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Ce lieu en nous que nous ne connaissons pas – Radio Notre Dame

Culture Club – Ce lieu en nous que nous ne connaissons pas de Marie Balmary

Second frémissement médiatique suite à la parution du dernier livre de Marie Balmary, « Ce lieu en nous que nous ne connaissons pas ». Pour l’instant nous restons dans l’écosystème catholique (et parisien …) : Radio Notre Dame. Et il faut sans doute lire un « signe » dans cette programmation au sein du « Culture Club » … La vidéo est à votre disposition ci-dessous, suivie de quelques commentaires.1


Commençons par reconnaître que Marie Balmary n’est pas vraiment « calibrée » pour la « télé » ! A sa décharge, elle ne sort pas de l’ENA et ne dispose d’aucune équipe de conseillers en communication pour lui fournir des « éléments de langage », creux mais passe-partout. Elle prend tout simplement l’exact contrepied de ce qui est quasiment devenu la norme « odieuse-visuelle » : prendre le temps, d’écouter large & profond, de réfléchir large & profond, de formuler sa réponse le plus précisément possible, de soigner la qualité de la parole et de la relation … Bref, nous sommes avec elle aux antipodes d’Hanouna-Praud en quelque sorte, et c’est un grand bonheur !

« Exagérer » étant pour elle une seconde nature, elle n’hésite-t-elle pas à rappeler des évidences parfois bien oubliées et toujours aussi dérangeantes : hors de la relation, point de joie [χαρα].

  • « … depuis qu’on est enfant, qu’est-ce qui nous rend le plus joyeux ? C’est d’être aimé et d’aimer … » 2
  • « … si on écoute les chansons, si on écoute des choses qui passent en dessous de nos radars scientifiques, « sans amour on n’est rien du tout », ça ne veut dire rien ça ? On le sait depuis toujours non ? 3

mais n’oubliez pas
dans la vie y a qu’une morale
qu’on soit riches ou sans un sou
sans amour on est rien du tout
on est rien du tout

« … on peut s’étonner que ça nous étonne nous les humains, qu’on découvre que c’est essentiel … »

Elle rappelle volontiers l’essence de sa démarche, au fond tellement simple, puissante et utile. A point de départ clinique le plus souvent, en relation avec une personne à qui un texte « fait mal quand il le lit ou quand on le lui prêche ». Puis au chevet du texte trouvé « mortifère » lui-même pour, avec d’autres, en vérifier soigneusement la traduction. Qui s’avère toujours sinon fausse, pour le moins très tendancieuse : « … donc la souffrance de la personne était un guide et et notre jubilation quand on extrait ce texte du piège qu’il constituait, c’est un bon guide. On a donc deux guides, la souffrance et la joie. » 4

Pour le reste un seul conseil : lisez, crayon en main, dans le dernier livre de Marie Balmary les chapitres consacrés aux divers thèmes nécessairement survolés dans cette courte émission … peut-être un peu bâclée selon moi. Je suis d’ailleurs prêt à parier que vous prendrez goût à ses heureuses trouvailles et que, peu à peu, vous lirez toute son œuvre ! Avec jubilation !5

« Tout est bon chez elle, y’a rien à jeter,

Sur l’île déserte il faut tout emporter. »

Rien A Jeter – Georges Brassens

Ah, j’allais oublier ces « deux petites paraboles de rien du tout » qu’on trouve en Matthieu 13, 44-46 :

« Le royaume des ciels est semblable à un trésor caché dans le champ. Un homme le trouve, le cache et, dans sa joie, il va, vend tout ce qu’il a, et achète le champ.

Et encore, le royaume des ciels est semblable à un marchand qui cherche de belles perles.

Quand il a trouvé une perle très précieuse, il s’en va, liquide tout ce qu’il a et l’achète. »

[παλιν ομοια εστιν η βασιλεια των ουρανων θησαυρω κεκρυμμενω εν τω αγρω ον ευρων ανθρωπος εκρυψεν και απο της χαρας αυτου υπαγει και παντα οσα εχει πωλει και αγοραζει τον αγρον εκεινον

παλιν ομοια εστιν η βασιλεια των ουρανων ανθρωπω εμπορω ζητουντι καλους μαργαριτας

ος ευρων ενα πολυτιμον μαργαριτην απελθων πεπρακεν παντα οσα ειχεν και ηγορασεν αυτον]

Si, comme « le jeune homme riche », vous cherchez « un commandement de plus », la Vision du Soi selon Douglas Harding ne vous apportera … rien, aucune satisfaction. Mais, si tel est votre plus profond & sincère désir, elle peut vous montrer comment trouver – simplement, concrètement et, bien sûr, joyeusement – le « trésor », la « perle de grand prix », le « gros poisson » (Thomas, logion 8)6 : c’est-à-dire l’espace d’accueil illimité & inconditionnel que vous êtes, que nous sommes tous, notre « autoportrait », notre « visage originel », le « vide médian » de la « ronde », … La dénomination retenue et son référencement culturel n’ont d’ailleurs aucune espèce d’importance. Ça vaut le coup d’essayer, non ? La vie est parfois courte, il n’est pas complètement absurde d’envisager de « manger le dessert en premier », sans attendre … !

J’ai également beaucoup apprécié que Marie Balmary précise le sens qu’elle donne au verbe généralement traduit par « comprendre » en Matthieu 19, 11-12. « C’est le verbe contenir et pas comprendre, autrement dit c’est un verbe de capacité » :

« Il leur dit: « Tous ne saisissent pas cette parole, mais ceux à qui c’est donné. »

[ο δε ειπεν αυτοις ου παντες χωρουσιν τον λογον τουτον αλλ οις δεδοται]

Qui peut pénétrer, qu’il pénètre ! »

[ο δυναμενος χωρειν χωρειτω]


Effectivement, ce sens possible de « Choreo » [χωρέω] correspond au percept essentiel de l’espace d’accueil, du « contenant », de la « capacité », … dans la Vision du Soi. Cette possibilité offerte d’être « intérieurement activement passif » pour consentir à être vide, à s’ouvrir, à se dilater, à faire place à un Soi infiniment plus grand que soi, etc. trouve de nombreux échos dans la littérature spirituelle universelle ; Jean-Louis Chrétien en a étudié quelques-uns dans « La joie spacieuse ».

Alors est-ce que Marie Balmary « chipoterait » puisque le champ lexical du verbe « comprendre » intègre aussi ce sens ? Pas sur, puisque le sens largement majoritaire relève désormais presque exclusivement du fonctionnement de « l’appareil psychique »

D’ailleurs comme vous l’avez lu ci-dessus, Chouraqui utilise deux verbes différents : « saisir » et « pénétrer » pour traduire le même verbe grec. Et les autres traductions s’essaient à diverses propositions : « recevoir, accepter, être capable de comprendre, … ». Bref ça hésite un tantinet et, du coup, Marie Balmary sait qu’il est nécessaire de creuser !

Comme « les mots sont une aide, les mots sont l’entrave … », si vous désirez plus que tout contribuer activement à la « dilatation » de votre « cœur », utilisez donc la clé de la Vision du Soi :

« … J’avais perdu une tête et gagné un monde. … »

« … I had lost a head and gained a world. … »

« Vision »

NB : ce texte est à vivre, pas seulement à lire.


Cordialement

  1. Le visuel de cette émission m’a instantanément déplu … Que signifie donc ce visage d’animateur (Christophe Mory) promu au premier plan et en pleine lumière, avec un sourire éclatant (… presque à cran d’arrêt !), alors que l’invitée se trouve reléguée dans un flou assombri ? La présentation du livre et de son auteur, la conduite un peu brouillonne de l’entretien, sa conclusion … n’ont rien arrangé. Heureusement que la bienveillance de Jean-François Rod envers Marie Balmary contrebalançait tout ça. ↩︎
  2. Le jeune grand-père que je suis désormais confirme l’absolue justesse de cette observation : « … ce qui nous rend le plus joyeux ? C’est d’être aimé et d’aimer. » Et le jeune petit-fils (un an) est, comme la plupart de ses pairs, un expert absolu de la perception de cette relation. Le nourrir, le vêtir, le soigner, changer ses couches … ne suffit pas. « Redevenir comme les petits enfants » (Matthieu 18, 3), la condition sine qua non … ↩︎
  3. Dans un tout autre contexte, Jean-Pierre Dupuy a écrit : « Nous ne croyons pas ce que nous savons ». Il me semble que cette puissante remarque s’applique à bien des domaines … peut-être même à tous ? D’où l’intérêt du travail de Marie Balmary, qui nous aide à « croire » à l’existence de « ce lieu en nous que nous ne connaissons pas » & de la Vision du Soi qui nous aide à Le Voir, à Voir que nous le sommes, tous, et à « coïncider silencieusement » avec lui. Vérifiez ! ↩︎
  4. Les évêques, évoqués collectivement en fin d’émission, sont-ils capables de porter attention à la souffrance provoquée par un texte mal traduit qui « fait mal«  ? Ceux qui ont montré une coupable indifférence envers leurs ouailles abusées par des pasteurs – « un phénomène massif et systémique » selon la CIASE – et une non moins coupable sollicitude envers certains de ces abuseurs, seraient-ils capable d’accueillir avec joie les rectifications apportées aux textes par Marie Balmary ? J’en doute fortement ; ces « fonctionnaires de Dieu » préfèrent sans doute conserver une lecture de « soumission au surmoi » plutôt que d’oser s’ouvrir à celles de la « libération du sujet ». Si d’aventure Marie était invitée à Lourdes, gare aux coups de crosses ! ↩︎
  5. Marie Balmary a appliqué – avec succès – la méthode de Freud à la propre histoire de ce dernier. Pourquoi donc ne pas lire pareillement son œuvre en appliquant sa méthode à elle : lire lentement, au plus prés des mots, creuser ses interprétations audacieuses, comparer, relier, oser retraduire … crayon en main ? Ne surtout pas « suivre » Marie Balmary, mais l’accompagner dans ses enquêtes et partager ses découvertes. Et pourquoi pas, promouvoir la démarche des ateliers Bible & Psy
    Il semble que de nombreux lecteurs partagent l’enthousiasme de Jean François Rod, puisque ce « livre magnifique » figure en très bonne place des ventes de La Procure depuis de nombreuses semaines. Espérons que la diffusion déborde bientôt de ce cercle trop restreint … Les Évangiles sont des textes trop essentiels pour être laissés aux seuls catholiques ! ↩︎
  6. « L’homme est semblable à un pêcheur avisé qui avait lancé son filet à la mer : il le retira rempli de petits poissons. Parmi eux, il en trouva un, beau et grand. Il le choisit sans hésiter et rejeta tous les petits poissons à la mer. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! »
    Les amateurs de Thomas liront avec intérêt « L’évangile de Thomas. Le Royaume intérieur » de François de Borman. ↩︎

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

6 réponses sur « Ce lieu en nous que nous ne connaissons pas – Radio Notre Dame »

Ce n’est pas l’âme, la psychè en grec, qui est synonyme de désir et qui est comparable au désir dans la théologie du Nouveau Testament et la pensée du premier du Christianisme. Mais c’est la charis, autrement dit la grâce. Ce que Marie Balmary, qui s’échine à traduire les textes bibliques depuis plus de 30 ans, devrait savoir.
Quant au lieu que nous ne connaîtrions pas et dont nous provenons tous, il n’est autre que celui de la Mère et du maternel, ces hypostases psychosomatiques que la Révélation chrétienne avec sa foi et son amour charitable, de nature maternelle, et non pas le monothéisme biblique, adossé à la Loi qui est de nature paternelle, ne cesse de répandre comme une « Bonne Nouvelle » pour tous ceux qui désirent revenir à cet état d’être régressif que fut la vie intra-utérine. Et cela via la filiation qui fait de nous d’éternels enfants, toujours dépendants et soumis. Si c’est là le cœur du message que veut propager M. Balmary, il serait peut-être pertinent de le nommer précisément au lieu de répéter inlassablement les mêmes idées depuis tant d’années…

Bonjour Bruno,

Comme d’habitude, « j’approuve » (dans le jargon wordpress) ce commentaire pour qu’il apparaisse, mais je le désapprouve aussitôt !

Ne reprochez pas à une psychanalyste qui campe dans la Genèse depuis fort longtemps de mettre le « désir » en avant. Désir de dieu de « créer & bara » le monde, désir d’Adam d’un « autre », désir d’une relation saine entre Adam et Eve, etc. … Une fois de plus, si ce qu’elle écrit ne vous plait pas, allez voir ailleurs. C’est peut-être d’ailleurs l’esprit (saint) & pneuma qui « souffle où il veut » qui inspire tous ces profonds désirs … ?
La charis … je la vois plus du coté de cette « joie sans objet » dont nous avons déjà longuement parlé. Je vous indique le lien vers le verbe, qui me semble moins déformé & déformant que le strong 5485.

Ce « lieu que nous ne connaîtrions pas » … une régression intra-utérine ! Vraisemblablement vous n’avez rien lu, ou rien voulu comprendre de toute la recherche de Balmary pour écrire une bêtise pareille ! Avec beaucoup de subtilités & de connaissances, elle nous propose de l’accompagner … dans une toute autre direction.
Je vous invite à consulter un de ses vieux articles inactuels : « Le créateur, un père ? Où est la mère ? ». Ça devrait pouvoir éclairer un peu votre lanterne … j’espère.

Cordialement

Bonjour Bruno,

Je vois que vous avez retrouvé de l’énergie (bonne nouvelle) et que, du coup, vous revenez à vos vieux démons (mauvaise nouvelle) ! Critiquer, critiquer … il en restera toujours quelque chose ! Que vous restez dans une posture amère, contre tout ce qui est pour (« Le Collège des Bernardins est un espace de liberté qui invite à croiser les regards pour cheminer dans la compréhension du monde et bâtir un avenir respectueux de l’homme. ») et pour tout ce qui est contre … C’est vraiment dommage, surtout pour vous.

Que Marie Balmary ne soit pas des plus à l’aise dans un contexte « odieux-visuel », je crois qu’elle est la première en être bien consciente. Mais dans sa partie propre d’écoute & de réflexion large & profonde et d’écriture, c’est une véritable orfèvre. Son dernier livre vient, s’il en était encore besoin, de le confirmer.

En tous cas, merci de me rappeler l’existence de cette intervention : elle restait à l’état de brouillon dans volte-espace depuis trop longtemps et il va falloir que je la transforme en billet.
J’en profiterai pour dire aussi que si cette intervention de Marie Balmary est difficile à écouter, même pour moi, elle participe activement d’une résistance tenace contre « La parole humiliée ».

Cordialement

Voilà bien une réaction de personne dépitée et froissée dans son amour-propre et son hypersensibilité!
J’avais pensé qu’un peu d’humour ne ferait pas de mal sur votre site, et surtout envers Marie Balmary qui se prend toujours au sérieux avec son regard acide et plein de gravité de grand-mère fatiguée (dixit, l’un de mes amis…) .
Mais si l’on ne peut plus rire un peu de ce qui vous touche comme de ce que vous avez sacralisé, n’est-ce pas le signe des limites de votre pratique et de votre voie spirituelle?… A méditer. Bruno

Bonjour Bruno,

Si j’avais été dans le climat émotionnel que vous me prêtez, je n’aurais même pas validé votre commentaire.
Alors qu’il ne s’agit pas de moi, mais de vous … Avez-vous seulement visionné cette vidéo dans son intégralité ? Avez-vous réfléchi à tout ce qui y était prononcé ? Si vous n’aimez pas la recherche de Balmary, allez voir ailleurs, tout simplement.

De quoi voulez-vous qu’une « grand-mère fatiguée » ait l’air, sinon d’une grand-mère fatiguée ?
Alors « grand-mère » c’est à la fois factuel, mais c’est aussi dans le contexte du zen qui m’est cher, le compliment ultime, adressé notamment à Houang-Po. Depuis que je suis grand-père, je m’émerveille encore plus de la justesse de cette formulation : « gentillesse d’une bonne vieille grand-mère ».
Et « fatiguée » il y a peut-être des raisons, comme l’indifférence, la négligence, l’hostilité même parfois … envers la qualité de sa recherche et la pertinence de ses trouvailles. Il semblerait que ça commence à changer un peu – enfin ! – puisque son dernier livre « cartonne » à La Procure depuis de nombreuses semaines.

En tous les cas, merci encore de m’avoir rappelé l’existence de cette vidéo importante.

Cordialement

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