L’écrivain et poète Christian Bobin est mort (0)
Marie Chaudey : Votre recueil (« Le Muguet rouge ») porte une férocité nouvelle, pourquoi ?
Christian Bobin : Parce que le temps presse. Les cavaliers de l’Apocalypse sont arrivés à notre seuil, ils attendent que l’on ouvre. Et même à travers le bois de la porte, ils nous regardent … Je souligne que, dans son sens originel, l’apocalypse n’est pas une fin du monde, mais d’abord un dévoilement. Et précisément, c’est celui-ci que nous refusons : nous ne voulons pas voir ce que nous avons fait à cette terre et ce que nous sommes devenus. La situation a été tenable un moment, mais désormais elle se retourne contre nous. Dans la Bible, les quatre cavaliers de l’Apocalypse du texte de Jean amènent la guerre, les épidémies, le désordre financier et le feu de la nature … N’avons-nous pas chacun de ces maux devant les yeux tous les jours ?¹
Nous en sommes arrivés à un abaissement spirituel, l’âme est devenue une espèce à protéger. Je me suis dit qu’il était peut-être temps, au moins une fois, au moins dans ce recueil, de voir au mieux, et d’aider le lecteur à voir lui aussi. Simplement voir. Loin de moi l’intention de faire un livre de morale – je n’aime pas ça de manière générale : le confort des sièges bien rembourrés pour le bien, et l’inconfort du petit tabouret boiteux pour le mal. Ce recueil n’est pas non plus un condensé d’opinions et de pensées. Je nourris juste l’ambition que le langage, en se densifiant jusqu’à son point de brûlure, ait une chance de réveiller quelque chose chez quelques-uns.²
« La mort devenait de plus en plus miniaturisée, des paillettes électroniques dans ses cheveux de cendre » : vous y allez fort !
Je ne souhaite pas non plus que l’on sorte déprimé de cette lecture. Car la fin du monde, c’est à chaque seconde, depuis que nous sommes nés, depuis toujours pour toute l’humanité. Pour l’homme des cavernes, la fin du monde commence par un grognement qui sourd du noir de la grotte où il a cru trouver refuge. Aujourd’hui, pour nous, la fin du monde est en jeu dans le dialogue des êtres et dans le maintien de l’humain à l’intérieur de l’humain. Elle n’est pas tant dans les machines, même si celles-ci aident beaucoup à notre destruction, mais elle est d’abord dans le face-à-face – comme aurait pu le dire Jean Grosjean : est-ce que toi qui me parles tu es là ? Est-ce que moi qui te réponds je suis là ? Est-ce que, par la parole, nous allons enfin ouvrir une fenêtre dans ce monde qui nous étouffe ?³
La chance de créer cette brèche est toujours possible, mais il y a urgence. J’ai écrit ce livre en croisant deux sortes de paille : la paille sombre d’aujourd’hui – on nous fait avaler par jour l’équivalent d’un siècle entier de poison et de désastre ; et puis la paille toujours existante, parce qu’invincible, de l’invisible : celle de l’amour quand il est à son point d’envol entre deux êtres ; ou celle d’un poème qui est encore vivant alors qu’il a été écrit il y a quatre siècles – les absents aussi peuvent nous aider. Mais il faut d’abord voir en face le mal qui vient : pour se sauver, on doit reconnaître son étendue.
N’y a-t-il pas deux visages différents de la mort, que vous opposez dans le Muguet rouge ?
En effet, il y a une mort dont on se remet paradoxalement assez bien, c’est celle qui arrive à chacun de nous par la loi de la nature. Une fleur éclôt sur terre, donne sa lumière, séduit quelques abeilles et, le soir venu, se replie sur elle-même, fane et meurt. Il en va de même pour nous : nous sommes voués à une mort qui n’est pas un abandon de souveraineté mais une métamorphose. C’est une chose qu’il serait folie de vouloir empêcher, comme les apprentis sorciers de la Silicon Valley en ont le sinistre projet. Car la mort est un sacre pour chacun, fut-il le plus pauvre ou le plus mal famé, on est confié à ce moment-là aux bras innombrables de l’invisible. (4)
Mais il y a une deuxième sorte de mort, dont il est difficile de sortir une fois qu’on y est entré. Elle est à l’intérieur même de la vie courante et nous est donnée par les injonctions du monde et la nécessité non expliquée de penser et d’agir de plus en plus vite, d’aimer de moins en moins, de vouloir de plus en plus. Cette mort-là, absolument désolante, dont personne ne porte le deuil, j’ai souhaité la montrer au plus près dans le Muguet rouge. C’est une mort sournoise qui commence par vider les yeux, et ensuite le cœur. (5)
Votre ville du Creusot est une cité marquée par l’épopée industrielle : avez-vous ressenti ses méfaits dès votre jeunesse ? Je remarque que vous mettez un P majuscule ironique au mot progrès …
Le « Progrès » a pris la place de Dieu. Il y a cette croyance absurde et morbide qu’il suffit de continuer sur sa lancée pour s’en sortir : qu’en élargissant la tache, on va la faire disparaître ! Quand en aura-t-on fini avec cette foi stupide en un « Progrès » qui va résoudre les problèmes du « Progrès » ? Comment peut-on demander à ce qui nous tue de nous ressusciter ? Durant mon enfance, au long des années 1950-1960, l’épopée industrielle et technique commençait déjà à s’essouffler. J’ai senti le poids des choses en train de s’effondrer sur elles-mêmes. C’est en en prenant le contre-pied que j’ai voulu écrire. (6)
Ce n’est pas un hasard si j’essaie de faire de l’écriture un rameau aérien, quelque chose de plus léger que la légèreté même. Parce que j’ai baigné dans cette atmosphère d’une cité dite « ouvrière », presque pharaonique à l’époque : je voyais les esclaves égyptiens défiler sur leur vélo pour répondre à l’appel des usines. Ils avaient une fierté – que je comprends d’ailleurs, parce qu’on leur donnait encore à l’époque une reconnaissance pour ce travail. Et en échange, on leur offrait une protection – tout cela a disparu très vite. J’ai connu cet univers par sa surface très pesante et par son dogme du travail – un monde qui nous empêche d’être … C’est parce que j’aime les gens que je n’aime pas le monde. (7)
J’ai connu la puissance financière, orgueilleuse, matérielle et tellurique du monde. Elle a ses beautés, comme un volcan a ses éclats. Mais il m’a paru nécessaire de sortir très vite de là pour rencontrer quelqu’un, pour avoir la chance de donner leur vie pleine aux chansons d’amour du XVIe siècle. Et je peux témoigner qu’elles sont vraies, dans une amitié profonde entre deux personnes, dans un lien qui n’est plus d’avidité ni d’emprise, mais de respiration commune, enjouée et élargie. (8)
« L’absence, le vide, le manque, qu’avez-vous fait d’eux ? Ce sont notre seul bien », affirmez-vous …
Ces choses-là sont la source de la beauté. C’est de nos nuits de désespoir que va fleurir une glycine qui se penche par-dessus un mur. C’est de nos déchirures, de nos doutes et de nos manques que naissent des palais dans les cieux et toutes sortes de printemps imaginables. Si nous nous coupons de ces racines profondes, alors nous nous coupons des fleurs et des fruits qui viennent après et naissent d’elles. Il y a un lien entre la plénitude et le manque, entre le visible et l’invisible.
Je n’écris pas pour réparer, je n’ai pas cette prétention-là, mais pour faire se rejoindre ce qui a été disjoint par notre inattention, notre paresse, et par la violente modernité. J’écris pour qu’on puisse à nouveau ressentir le frôlement de l’invisible dans le visible, ici-bas. Je ne dis pas qu’il y a un autre monde, je n’en sais rien, bien que j’en aie souvent le soupçon. Mais je dis qu’à l’intérieur de notre monde terrestre, il y a des choses à la fois faibles et immortelles, très précieuses, qui nous mettent leur main sur l’épaule et nous demandent de faire attention à nous. J’écris en espérant faire entendre cette parole que nous massacrons avec nos bruits, notre avidité et notre insensibilité grandissante. (9)
Votre recueil ouvre sur cette phrase : « Mon père mort me montre deux brins de muguet rouge »…
Je ne suis pas l’auteur de l’expression, c’est bien mon père disparu qui m’a nommé cette merveille dans un rêve que j’ai fait. Tout vient d’une parole, comme une étoile descendue dans le puits du sommeil et qui m’a donné ce cadeau incroyable du livre entier, en fait. Car mon père m‘invite ensuite à chercher ceux qui cultivent le muguet rouge : ils sont de sa famille et il me pousse à les reconnaître. Une fois éveillé et me mettant à écrire, le muguet rouge m’est apparu comme un paradoxe vivant.
Dans l’imaginaire, le muguet est nécessairement vert et blanc. Mais qu’est-ce qui existe et qui n’existe pas ? C’est Dieu, c’est l’amour et c’est le muguet rouge … C’est une grande vertu tantôt de ne pas être là, et tantôt d’être là, cela permet d’échapper à toute incarcération dans un dogme, dans une définition et un confort. J’ai reconnu que ceux qui étaient porteurs du muguet rouge, ce rouge battant du cœur, sont pour la plupart des inconnus qui aident à maintenir le monde à flot, à ne pas avoir le souffle complètement brisé, et peut-être même à commencer un début de réenchantement. La confrérie du muguet rouge est une sorte de compagnie secrète … (10)
… qui seconde le poète ?
Si le poète a un rôle, c’est de rehausser le langage à son point d’incandescence. C’est par les yeux du langage que nous voyons. S’ils se sont fermés à force de publicité et d’abrutissement, qu’au moins quelqu’un ici ou là redonne à ce langage sa splendeur native, et nous remette au premier matin du monde, qui peut toujours venir. La fin du monde est juste à côté du premier matin du monde. Ce n’est pas si compliqué de tenter un pas de côté : il peut être fait à tout moment, même aujourd’hui alors que nous commençons à payer le prix fort. Comment ne pas voir le paradis à côté de l’enfer ? Mais désormais, l’enfer est tellement ronronnant que nous perdons même de vue son voisin. (11)
Au fond, sans lâcher une seconde un instinct contemplatif, c’est pour donner à la douceur réelle des choses sa vraie lumière qu’il m’a fallu éclairer aussi la face sombre du monde. Mais les choses d’esprit sont vivantes à jamais et pour toujours. Le sourire de mon père, qui a déjà eu lieu il y a plus de 20 ans, hante mes livres. Les vrais instants ne sont jamais pris par le temps, car ils étaient déjà saisis par l’éternel. Écrire, c’est travailler du côté de l’éternel, je suis un petit soldat au service de l’invisible, un simple maquisard.
« Cimetières et librairies sont les derniers endroits civilisés »
Pour une revue de bibliophiles, j’ai écrit un jour un petit texte que je n’ai d’ailleurs pas retrouvé. J’ai inventé un gardien de cimetière, qui un peu lassé par la monotonie de son métier, inscrivait sur les tombes des gens des titres de livres, s’accordant à leur personnalité et leur vie passée.
J’ai ainsi rassemblé les deux sujets qui m’importent : les livres et les disparus. Les vies sont comme des livres et les livres sont comme des vies, les deux sont vivants … Les deux sont inséparables. Il faut que dans la vie tout soit vivant, qu’entre nous tout soit vivant. Il faut que chaque phrase d’un livre soit bondissante comme un enfant qui va au réveil déranger le sommeil de ses parents. Et c’est ainsi que l’humanité peut s’en sortir …
&
Lors de notre dernière rencontre le 28 septembre dernier, on avait été surpris d’apprendre qu’il avait quitté sa paisible maison du « Champ Vieux » nichée au milieu des bois (« Le terrain alentour demande trop d’entretien », avait-il expliqué sobrement) pour aller vivre au cœur de sa bonne ville du Creusot, dans un appartement depuis lequel il confiait aimer avant tout regarder le ciel …
Christian Bobin n’avait rien laissé paraître de la maladie qui l’a emporté à 71 ans le 23 novembre 2022, et qui va laisser ses milliers de lecteurs, fidèles, sous le choc. C’est une voix unique et singulière, alliant la poésie à une spiritualité très libre, qui s’en est allée. La voix d’un contemplatif émerveillé par la nature, à la simplicité et à la candeur revendiquées, à la sobriété défendue bien avant l’heure – son premier recueil, Lettre pourpre date de 1977 ; le Très-bas, le récit sur saint François d’Assise qui l’a rendu populaire, a été publié en 1993. Une voix aussi douce que mordante, celle d’un inclassable veilleur, d’un critique de notre modernité sans âme, d’un voyant toujours sur la brèche pour dénoncer le désastre né d’un matérialisme obtus – son dernier livre, le Muguet rouge, porte haut la rébellion face à l’effondrement annoncé.
Cette voix avait trouvé son style singulier, fait de courts paragraphes et d’aphorismes ciselés comme autant de haïkus. Elle va nous manquer, même si la force de sa poésie la laisse vivante dans ses recueils. Lui qui parlait de la mort en poète croyant – « Ce n’est pas pour devenir écrivain qu’on écrit. C’est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour ». Il affirmait également dans la Muraille de Chine : « La plus noble façon de disparaître est la lecture. C’est aussi l’acte d’amour parfait : une âme touche une âme, directement » … Revoici notre dernier entretien.
&
Cordialement
0 – Volte-espace propose une étiquette Christian Bobin : de nombreux billets déjà, et donc parfois des textes secondaires. Mais cet entretien avec Marie Chaudey, conduit peu de temps avant sa mort, mérite d’être lu et largement partagé.
En réalité, « Vous n’êtes pas mort, Christian Bobin » !
¹ – Comme l’a écrit Jean-Pierre Dupuy : « Nous ne croyons pas ce que nous savons ». L’accumulation de connaissances à propos de l’effondrement de nos sociétés est gigantesque, le consensus scientifique mondial impressionnant, de nouveaux faits confirment chaque jour les hypothèses et … les « capitaines » du navire refusent obstinément de changer de cap … Nous restons collectivement enlisés dans le stade du déni d’Elisabeth Kübler-Ross.
Il me semble que « ce que nous sommes devenus » détermine « ce que nous avons fait à cette terre ». C’est cette composante humaine première qui permet à l’Apocalypse de Jean de conserver sa pertinence.
² – Ce « Simplement voir » résume assez bien le projet de la Vision du Soi selon Douglas Harding. Une méthode – simple donc, mais également concrète & joyeuse – pour réintégrer sa pleine stature Corps & Âme – Esprit, pour « réveiller quelque (non-) chose chez quelques-uns ». Essayez, vérifiez !
³ – « Le dialogue des êtres et le maintien de l’humain à l’intérieur de l’humain » ne seraient-ils pas en fait totalement conditionnés par une sortie résolue de ce « face-à-face » ? Est-il possible d’« ouvrir une fenêtre dans ce monde qui nous étouffe », un véritable dialogue, tant que « toi qui me parles » et « moi qui te réponds » nous ne sommes pas « là », dans le « Je Suis » central du dessin ci-dessous, espace d’accueil illimité & inconditionnel, « contenant », « capacité », « essence transparente comme le cristal » ?
Tant que nous ne coïncidons pas entièrement avec notre « autoportrait » ?
4 – Cette « mort dont on se remet paradoxalement assez bien » … !, Douglas Harding l’a minutieusement examinée, notamment dans « Le petit livre de la vie et de la mort ».
Impossible de comprendre quoi que ce soit aux deux « morts » évoquées ici par Christian Bobin en dehors de l’anthropologie ternaire Corps & Âme – Esprit. Le site de Michel Fromaget a fait peau neuve : allez donc y jeter un œil, le bon !
5 – Ce que certains ne pardonneront jamais à Christian Bobin, c’est le rappel, la mise en évidence de cette « mort sournoise » imposée par le « monde ». Il est pourtant assez simple de sortir de cette pseudo-vie de zombie : penser et agir de moins en moins vite, d’aimer de plus en plus, de vouloir de moins en moins …! Injecter de la conscience pour « renverser la thèse du monde ». La Vision du Soi et la méditation dans l’esprit du zen peuvent s’avérer utiles. Essayez, vérifiez !
6 – Le changement de cap évoqué plus haut ne sera pas facile et il risque de bouleverser des équilibres bien précaires. Mais, globalement, nous persistons à chérir ce que Paul Watzlawick a nommé « l’ultra solution » : continuer à « faire toujours plus de la même chose », ce qui est la meilleure façon de « réussir à échouer ». Le « Progrès » dénoncé par Christian Bobin risque fort de se conclure comme cette plaisanterie de carabin réhabilitée par l’École de Palo Alto : « opération réussie, patient décédé » !
La clé de bon nombre de nos problèmes actuels se trouvera sans doute plus du coté des psychologues, psychothérapeutes, psychanalystes, anthropologues, sociologues, spécialistes de la communication … que de celui des économistes ou des scientifiques « durs ». Et si nous partions à rigoureusement 180° de ce « Progrès » là ?
« De toutes les illusions, la plus périlleuse consiste à penser qu’il n’existe qu’une seule réalité. »
« La survie des êtres vivants dépend de l’information convenable ou non qu’ils reçoivent sur leur environnement. »
Paul Watzlawick
« La réalité de la réalité », Éditions du Seuil, 1978
7 – J’ai grand plaisir à recoller ci-dessous cet extrait du « Très-Bas » définissant précisément le « monde » :
« Le monde veut le sommeil. Le monde n’est que sommeil. Le monde veut la répétition ensommeillée du monde. Mais l’amour veut l’éveil. L’amour est l’éveil chaque fois réinventé, chaque fois une première fois. Le monde n’imagine pas d’autre fin que la mort, cette extase du sommeil, et il considère tout à partir de cette fin. … L’enfant va à l’adulte et l’adulte va à sa mort. Voilà la thèse du monde. Voilà sa pensée misérable du vivant : une lueur qui tremble en son aurore et ne sait plus que décliner. C’est cette thèse qu’il te faut renverser. »
Et, comme Bobin, « C’est parce que j’aime les gens que je n’aime pas le monde ». C’est un « dogme du travail » orienté uniquement vers l’extérieur, vers la périphérie qui « nous empêche d’être ». Ce qui s’avère indispensable pour nous sauver nous-mêmes & sauver le monde, c’est la réorientation d’une partie de ce travail vers l’intérieur, vers le « Je Suis » central, le rééquilibrage entre l’intérieur et l’extérieur … qui en réalité ne font qu’Un.
Cet « éveil » qu’est la « mort » à une vision totalement fausse, réductrice, étriquée, … de nous-même – cette pseudo-vie dans la seule zone périphérique « je suis humain » du dessin de la note n° 3 – peut advenir subitement certes, mais il nécessitera bien du « travail », une « discipline assidue », pour être complètement intégré. Ne craignez surtout pas de vous ennuyer !
La Vision du Soi selon Douglas Harding constitue un outil particulièrement puissant pour « renverser la thèse du monde ». N’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez … !
8 – La relation très particulière entre deux personnes conscientes de leur vraie nature commune d’espace d’accueil illimité & inconditionnel rejoint, bien évidemment, cette « amitié profonde entre deux personnes, dans un lien qui n’est plus d’avidité ni d’emprise, mais de respiration commune, enjouée et élargie ». Cette communion issue d’un élargissement mutuel infini n’est pas un doux rêve de poète, mais le fond commun même de toutes les sagesses & spiritualités, l’expression de Ce Que nous sommes vraiment, tous.
Et nous serions prêts à perdre cet accomplissement – ce salut – pour l’illusion d’une « puissance financière, orgueilleuse, matérielle » qui, de plus, nous conduit désormais droit à l’effondrement ?
« Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, vanité des vanités, tout est vanité. »
« Fumée de fumées, dit Qohèlèt ; fumée de fumées, tout est fumée. » … ou encore « Buée de buées … ».
André Chouraqui
9 – Une réparation symbolique en quelque sorte. « Ce qui a été disjoint par notre inattention, notre paresse, et par la violente modernité », ne serait-ce pas la troisième personne confinée en périphérie dans la zone « je suis humain » et le « Je Suis » Central du dessin de la note n° 3, une de nos identifications parmi d’autres et notre Identité ?
Un atelier de Vision du Soi nous invite à « faire attention à nous », à la totalité de nous-même, … et à « réparer » ce qui n’est séparé que par la plus funeste des illusions. Essayez, vérifiez !
10 – « C’est une grande vertu tantôt de ne pas être là, et tantôt d’être là … ». Un ouvrage de Douglas Harding s’intitule « Être et ne pas être » et son auteur prétend que « c’est la réponse » ! Pour être un peu plus précis – en attendant que vous lisiez ce livre pour vérifier – disons simplement : exister en périphérie et Être au Centre – là, coïncider silencieusement avec notre vraie nature d’espace d’accueil. Simultanément, partout & tout le temps, simplement, concrètement, joyeusement …
11 – « Ce n’est pas si compliqué de tenter un pas de côté … » : même pas un pas, juste le retournement du regard vers sa Source ! Presque pas besoin de mots, juste de quelques expériences de Vision du Soi pour, ensuite et éventuellement, « rehausser le langage à son point d’incandescence ». Essayez, vérifiez !
» Pourtant, malgré la qualité magique et surprenante de cette perception visuelle, il ne s’agissait ni d’un rêve, ni d’une révélation ésotérique. Plutôt l’inverse : un éveil soudain qui m’arrachait au sommeil de la vie ordinaire, la fin d’un rêve, une réalité qui rayonnait de sa propre lumière, et pour la première fois lavée de la pensée qui obscurcit. C’était la révélation tant attendue de l’évidence même, un moment de clairvoyance dans l’histoire confuse de ma vie. Je cessais d’ignorer une chose que (depuis ma plus tendre enfance, en tout cas) je n’avais pu voir, égaré par trop d’occupations ou de faux-fuyants.
C’était une attention nue, sans jugement, à une réalité qui n’avait pas cessé de me « dévisager » : mon absence totale de visage. Bref, tout cela était parfaitement simple, ordinaire et direct, au-delà du raisonnement, de la pensée, et des mots. En dehors de l’expérience elle-même ne surgissait aucune question, aucune référence, seulement la paix, la joie sereine, et la sensation d’avoir laissé tomber un insupportable fardeau. »