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6 - Lectures essentielles

Réflexions sur le Notre-Père II – Aldous Huxley

« Donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien (0)

Il est possible que le mot que l’on traduit par « quotidien » ait une autre signification et qu’il faille lire la phrase ainsi : « Donne-nous aujourd’hui notre pain du jour (éternel). » Cela mettrait l’accent sur le fait, assez évident pour qui est familier avec la langue des Évangiles, que le pain dont il est question est une nourriture divine et spirituelle, la grâce de Dieu. La traduction traditionnelle tient pour acquis que ce pain est de nature spirituelle et insiste sur la pensée déjà exprimée par l' »aujourd’hui ».

Un homme ne peut se nourrir de ce qu’il mangera demain, ni du souvenir de ce qu’il a mangé la semaine dernière. Le pain ne remplit son office que s’il est consommé « aujourd’hui », ici et maintenant. Il en est de même des nourritures spirituelles. […] Dans la spirale ascendante de l’être, le saint contemplatif¹ occupe un point qui correspond exactement, mais à un niveau supérieur, à la place qu’occupent la fleur ou l’oiseau. Ils habitent tous l’éternité² ; mais alors que l’éternité de la fleur ou de l’oiseau n’est que l’éternel présent sans conscience du processus naturel, l’éternité du saint est union avec cette pure conscience qu’est la réalité ultime³. […] Telle est la vérité clamée par tous les grands maîtres spirituels de l’histoire : l’illumination, la libération, le salut, appelez cela comme il vous plaira, ne peut être donné qu’à ceux qui vivent au présent dans la contemplation de l’éternelle réalité et non dans l’évocation du passé ou de l’avenir de l’homme, dans l’évocation de ses habitudes, de ses désirs et de ses craintes.

Le Christ a particulièrement insisté sur l’urgente nécessité de vivre dans le présent spirituel. Il a exhorté ses disciples à modeler leur vie sur la vie des fleurs et des oiseaux et à n’accorder aucune pensée au lendemain. A s’en remettre non à leur anxiété, mais à la grâce de Dieu qui devait leur être donnée en proportion exacte des prétentions et de la volonté personnelle qu’ils avaient abandonnées. La phrase du Notre-Père qui nous occupe ici résume tout ce que dit l’Évangile à ce propos. C’est maintenant que nous devons demander la grâce à Dieu, pour la bonne raison que, par nature, la grâce ne peut venir qu’à ceux qui vivent dans l’éternel présent.

Comme d’habitude, le problème pratique est terriblement ardu. […] Ce problème particulier – l’établissement d’une relation juste entre le monde de l’éternelle réalité et le monde humain du temps – est certainement l’un des plus ardus qui soit. Nous avons besoin de la grâce pour être apte à recevoir la grâce. » (4)

 Aldous Huxley

« Dieu et moi – Essais sur la mystique, la religion et la spiritualité »

Cordialement

 

0 – Ce billet vient en complément de mon 15° commentaire (… !) au texte de Marie Balmary « Les nourritures de l’âme ». Non encore achevé … patience !

Ce sont de larges extraits du chapitre 14, pages 139 à 141 de l’édition aux éditions du Seuil, Points Sagesses n° 165.

¹ – « Le saint contemplatif » de manière éminente certes, mais rien ne nous empêche de rejoindre nous aussi cette catégorie. Nous sommes tous construits en son image, tous dépositaires du même Visage Originel. Le programme est des plus simples : avoir l’audace de faire le premier pas, de Voir que nous sommes essentiellement espace d’accueil illimité & inconditionnel, puis travailler assidûment à la ressemblance. Simple ? Essayez, vérifiez !

² – Cette « éternité » est sans doute plus à chercher dans un en-deçà de tous les « niveaux » – avant l’espace et le temps – qu’au-delà. Au Centre – en « Je Suis » – plutôt qu’en périphérie … Essayez, vérifiez !

³ – Cf. « L’hypothèse de travail minimale », pour mieux comprendre ce qu’écrit là Huxley et, surtout, pour le réaliser. La Vision du Soi selon Douglas Harding peut vous y aider de manière décisive. Essayez, vérifiez !

4 – Aldous Huxley a-t-il lu « On having no head », le premier livre de Douglas Harding ayant eu un peu de succès ? C’est peu probable si l’on considère les dates de diagnostic du cancer de la gorge (1960) et du décès de l’un (22 novembre 1963. Sa plus grosse « erreur » : mourir le jour de l’assassinat de Kennedy !) et de parution de l’autre (1961). On peut assez facilement imaginer qu’à la seule lecture de « Vision » Aldous se soit enflammé, ait cherché à rencontrer Douglas, l’ait activement soutenu dans sa démarche de partage de cette clé universelle … Mais rien de tout cela n’est arrivé. Le partage de la Vision du Soi continue de se faire « malgré », comme toutes les choses réellement importantes …

Le dessin ci-dessus – carte majeure de la Vision du Soi – montre clairement que « l’établissement d’une relation juste entre le monde de l’éternelle réalité et le monde humain du temps » n’est pas un problème « des plus ardus qui soit ».Voir qu’essentiellement & centralement « Je Suis » et que secondairement & périphériquement « je suis humain » peut m’aider de manière décisive à résoudre cette contradiction apparente … en la vivant – simplement, concrètement, joyeusement. Essayez, vérifiez, et seulement ensuite lisez Huxley pour voir si « cet expert a bien pigé le truc » !

Si dans l’océan sans limites du wouèbe vous êtes parvenus à être informé de l’existence de la Vision du Soi, alors c’est que vous êtes  « apte à recevoir la grâce » !

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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