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Bible et psychanalyse, deux histoires de parole – Marie Balmary.

Bible et psychanalyse, deux histoires de parole

Entretien du 19/03/2000 avec Marie Balmary pour le journal Le Temps (0)

Psychanalyse. La Française Marie Balmary, qui donnera bientôt une conférence à Crêt-Bérard, relit la Bible comme on pratique une cure, pour guérir la civilisation judéo-chrétienne de ses maladies¹.

Le péché originel, cette violation du vouloir de Dieu dont tout chrétien est censé se sentir coupable, cette faute sculptée au fronton des églises, peinte à des milliers d’exemplaires, blâmée dans tous les catéchismes – le péché originel n’a jamais été commis ! Eve et Adam n’ont fait que succomber à un danger dont Dieu lui-même savait qu’ils ne pouvaient l’éviter.

En «croquant la pomme», nos plus lointains ancêtres n’ont pas «offensé Dieu» ; ils se sont, bien plutôt, mangés symboliquement l’un l’autre, renonçant à se reconnaître mutuellement comme autres, reconnaissance indispensable à toute prise de parole. Et si Dieu les a exposés à ce risque démesuré, c’est parce son espoir est que les femmes et les hommes arrivent eux aussi à devenir divins comme lui …

Depuis des décennies, la psychanalyste française Marie Balmary, tout en continuant à pratiquer des cures, lit et réinterprète audacieusement la Bible. Seule et avec d’autres, elle cherche à comprendre, à travers ces récits fondateurs, comment les êtres humains peuvent devenir des sujets parlants, comment ils peuvent apprendre, dans la relation avec autrui, à ne plus obéir à des idoles, mais à s’exprimer pleinement en leur propre nom. Ainsi, dans « Le Sacrifice interdit » (1986), l’essayiste renverse la lecture usuelle du célèbre épisode de la Genèse où Dieu demande à Abraham (croit ce dernier) de tuer pour lui son fils Isaac : YHWH (c’est ainsi qu’elle l’écrit) n’est plus un patron céleste tyrannique, mais au contraire un Dieu qui veut guérir l’homme de sa soumission.

Le quatrième ouvrage de Marie Balmary, intitulé « Abel ou la traversée de l’Éden », explore un autre épisode, tout aussi célèbre, du premier livre de la Bible : le meurtre d’Abel par Caïn, à la suite du refus de l’offrande du second par YHWH. Où le fils aîné du premier couple humain, «millénairement» désigné à la réprobation des honnêtes chrétiens pétris de bonne conscience, s’avère moins «méchant» qu’il n’y paraît …

Le Temps : – Pour Freud, la religion n’était qu’une instance répressive, alors que vous, vous allez jusqu’à donner à la notion psychanalytique de désir la signification d’un élan vers la transcendance !

Marie Balmary : – Freud pensait que la religion était ennemie du désir, qu’elle obligeait à y renoncer. Pour ma part, je vois dans le désir aussi ce qui pousse l’être humain vers l’infini, ce qui lui permet de ne pas se voir plus petit qu’il ne l’est².

– Que pensent vos collègues psychanalystes de cette revalorisation de la religion ?

– Leurs réactions sont variables. Il y a ceux pour qui la psychanalyse tient lieu de religion. Mais il y a aussi ceux, nombreux, qui laissent la porte ouverte. Freud et Lacan n’ont du reste jamais nié l’importance d’une connaissance culturelle de la religion dans la formation des psychanalystes.

– Vous-même, êtes-vous entrée en psychanalyse en tant que chrétienne ?

– Non, au départ pour moi, la psychanalyse était un moyen de libération de toute emprise, y compris celle de la religion. Mais est venu un moment où j’ai constaté par ma pratique clinique l’importance de la question de l’offense. Freud n’a pas pu croire aux récits de viols et d’incestes que lui faisaient ses patientes. En homme de son temps, il n’arrivait pas à admettre que ce genre de choses puisse se produire avec une telle fréquence. Il a considéré que c’étaient des fantasmes. Quant à moi, comme d’autres psychanalystes, tel Ferenczi, j’ai décidé d’y croire³.

– Et quel rapport y a-t-il entre ce problème et l’univers religieux ?

– S’il y avait une réalité derrière la maladie, il y avait aussi une loi qui permettait de nommer l’offense, par exemple une loi interdisant l’inceste. Je suis donc partie à la recherche des fondations des lois de la parole.

– Vous faites un parallèle entre l’interprétation des manifestations de l’inconscient, notamment les rêves, et l’interprétation des textes bibliques. La Bible est-elle l’expression de l’inconscient de l’humanité ?

– Je n’ai que des réponses fragmentaires à apporter à votre question. Il y a en tout cas la même densité de sens, exigeant un long déchiffrage, dans les mythes bibliques, comme dans d’autres grands mythes de l’humanité, tel celui d’Œdipe (4), que dans les rêves. Mais dans la Bible, il n’y a pas que des mythes, il y a aussi de quoi émerger des mythes. Les textes bibliques sont des textes pour éveiller et guérir (5).

– Votre interprétation de la Bible, c’est donc une sorte de cure appliquée à la civilisation judéo-chrétienne ?

– Je dirais que la Bible est une gigantesque station d’épuration de la parole. Les textes bibliques attrapent nos maladies, mais en y regardant de près, ils nous donnent aussi les moyens d’en sortir. Ce que nous avons lu dans une première lecture se renverse dans les lectures ultérieures (6).

– Le Dieu parfait de la première lecture devient ainsi un Dieu imparfait, ayant sa part de responsabilité dans le mal …

– Il devient un Dieu non total, qui refuse de prendre la place de l’autre. Mais c’est peut-être une forme de perfection !

– En vous lisant, on a l’impression que vous essayez de «sauver» la Bible pour la rendre acceptable aux gens de notre époque de démocratie et d’émancipation …

– Je n’ai jamais cherché à «sauver» la Bible. Ma recherche n’est pas à son service mais au service des êtres humains, qui ont besoin de récits fondateurs, à qui la science ne suffit pas pour donner goût à la vie. Nous lisons à plusieurs et nous nous sommes toujours dit que le jour où nous tomberions sur un texte inacceptable, nous arrêterions. Mais depuis vingt ans, il n’y a pas un seul texte contestable qui ne se soit retourné.

– Comment est reçue votre démarche dans les milieux religieux ?

– Mieux que dans certains milieux «laïques». Mon dernier livre a été très critiqué dans Le Monde et a reçu un bon accueil dans des journaux comme La Croix ou La Vie catholique. La manière dont la Bible est comprise aujourd’hui correspond probablement à une étape de la vie de l’humanité comparable à celle que traversent les individus. On n’a pas d’emblée les moyens de se placer à égalité avec les parents, avec les maîtres – avec Dieu. Mais les grandes traditions religieuses comportent la possibilité de faire ce passage.

– Ne pensez-vous pas que le langage utilisé dans les lieux de culte est un obstacle rédhibitoire à ce passage ? Toutes ces protestations de soumission, d’humilité, «Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres dans ma maison» …

– Ah, vous citez là une des phrases qui m’agacent le plus ! Mais je crois qu’on peut l’entendre ainsi : «Je te dis que je ne suis pas digne de m’approcher de toi, mais guéris-moi de cette croyance …» C’est vrai que l’évolution est lente, mais on la perçoit malgré tout à travers le langage que les gens choisissent d’utiliser dans les cérémonies où ils en ont la liberté, comme les enterrements.

– Tout de même, en niant l’existence du péché originel, vous remettez en question toute la doctrine de la rédemption, le motif même de la venue sur terre de Jésus-Christ !

– Je dis que je n’ai pas trouvé de péché originel dans la Bible, je demande simplement qu’on rouvre le débat. Cela étant dit, on peut voir dans l’Évangile autre chose que le rachat d’une faute. Pour moi, Dieu propose aux humains une épreuve d’accès au verbe, afin qu’ils puissent devenir ses égaux en divinité. Mais l’épreuve est d’abord trop difficile, les humains ne la réussissent pas. Le paradoxe, c’est que cette épreuve ne peut être réussie que par des êtres qui seraient déjà advenus à leur humanité, et qu’elle est en même temps le seul moyen pour y advenir (7).

– Vous avez l’air de vouloir supprimer la fonction structurante du Surmoi, cet œil de la conscience qui, dans le poème de Victor Hugo, poursuit Caïn jusque dans sa tombe …

– Aussi longtemps que l’être humain n’est pas «éveillé», il a besoin de s’en référer à la présence interne de ses parents et de ses éducateurs. Idéalement, cette présence interne s’efface progressivement, parce qu’on intègre ses bonnes recommandations à la première personne, et qu’on se libère de l’angoisse et de la culpabilité, de toutes ces mauvaises voix qui nous persécutent, qui ne sont pas nous et qui nous interdisent de vivre. Je crois possible un dépérissement du Surmoi que Freud, lui, n’a jamais envisagé.

– Dans votre lecture de l’histoire d’Adam et Eve, l’arbre de la connaissance du bien et du mal n’est autre que l’arbre de la différenciation, de l’altérité, condition de base à tout échange. Pourquoi en faites-vous aussi l’arbre de la différence sexuelle ?

– Parce que c’est la différence première entre les humains et que l’interdit est donné entre eux. C’est cette différence-là que le serpent, symbole phallique, invite Eve et Adam à supprimer, en faisant croire à Eve que l’absence de phallus est un signe d’infériorité, et qu’il faut la combler en s’appropriant la différence. Alors qu’Adam, en acceptant de recevoir … ce qu’il a déjà, se trouve amené à ne concevoir son propre sexe que sur le mode dominateur, phallique, de l’avoir.

– Votre interprétation des deux récits successifs de la création qu’on trouve dans la Genèse aboutit à l’idée que l’homme et la femme accèdent en même temps à leur humanité, mais vous maintenez tout de même que le féminin est le sexe second, le sexe du négatif …

– Et en quoi être second signifierait-il être inférieur ? Le premier récit («mâle et femelle il les créa») pose de manière inattaquable qu’il n’y a ni antériorité ni supériorité d’un sexe par rapport à l’autre. Le deuxième récit (la femme tirée de la côte d’Adam) se place dans une perspective différente, il raconte comment les êtres humains se perçoivent subjectivement eux-mêmes. Qu’une moitié de l’humanité commence par se sentir moins que l’autre, c’est un donné. Ce dont ce texte veut nous guérir, c’est de l’idée qu’être second serait moins bien qu’être premier.

– L’importance que vous accordez à la différence sexuelle implique-t-elle que vous avez une opposition de principe à l’égard de l’homosexualité ?

– Si tel était le cas, je devrais changer de métier ! Je dirai simplement que la question de l’identité sexuelle est un des grands problèmes de notre culture contemporaine, qui met en jeu l’appropriation de notre propre corps.

– Quels sont les dangers dont le serpent phallique menace aujourd’hui notre société ?

– Je mentionnerai d’une part le durcissement des relations de travail, où le plus recherché serait la puissance de faire taire l’autre (8). Et d’autre part la poursuite d’une maîtrise de la vie, à travers les techniques de procréation assistée les plus extrêmes, qui est au service de la maîtrise elle-même et non pas de l’être humain (9).

Cordialement

0 – Il me faut sans doute redire que je suis un inconditionnel de Marie Balmary, un groupie de la psyahanalyste ! Rassembler sur ce site ses diverses interventions dispersées dans l’océan du wouèbe, et m’efforcer d’établir des liens avec le projet Volte & Espace de partage de la Vision du Soi selon Douglas Harding, me semble à la fois nécessaire et utile. C’est à la fois une innocente manie de collectionneur, et j’espère un peu plus … et mieux !

Une étiquette « Balmary Marie » permet d’accéder aux articles de volte-espace dans lesquels elle est mentionnée peu ou prou. Et, si comme je l’ai déjà écrit dans un précédent article :

« Tout est bon chez elle, y a rien à jeter,

Sur l’île déserte il faut tout emporter. »

… n’en croyez bien sûr pas un traître mot, vérifiez en lisant (et relisant) ses livres !

NB : Cet « Adam et Eve » de Hans Sebald Beham m’a semblé suffisamment original pour illustrer des propos sur le péché originel ! Il y aurait beaucoup à dire sur cette gravure datant de 1543 … J’essaierai, promis.

¹ – Ne jouons pas petit, cela ne sert pas le monde : certes les travaux de Marie Balmary sont soigneusement ancrés dans la culture « judéo-chrétienne« , mais leurs fruits sont réellement en mesure de « guérir la civilisation … de ses maladies », ou peut-être, plus exactement, d’entrer, enfin, en civilisation, de disposer des diagnostics et prescriptions nécessaires pour lui donner, enfin, toute sa mesure humaine. La « civilisation » est sans doute malade … de ne pas encore être véritablement une civilisation.

NB : Vous connaissez peut-être le bon mot du Mahatma Gandhi qui, lors d’un voyage au Royaume-Uni, avait répondu à un journaliste qui lui demandait ce qu’il pensait de la civilisation occidentale :

« Ce serait bien. »

La civilisation (occidentale) ne semble pas encore être vraiment advenue, et bien des « développements » récents laissent même entrevoir de sérieuses régressions en cours et en préparation … Les travaux de Marie Balmary et la Vision du Soi pourraient contribuer utilement à améliorer la situation. Ou, a minima, à éviter que le monde ne se défasse trop rapidement, trop violemment …

Comment ? En ce qui concerne la Vision, tout simplement en permettant à celui qui le veut vraiment et qui a l’audace d’aller au bout de sa recherche de Voir clairement par lui-même, im-médiatement, qu’il EST en réalité ce qui nous fait le plus cruellement défaut aujourd’hui pour penser & agir : cet « Espace pour ce qui peut se produire de nouveau ».

Toutes les traditions spirituelles affirment depuis toujours l’évidence que chacun d’entre nous EST cet Espace, même ceux qui n’en ont pas conscience et/ou s’en défendent avec acharnement. Les travaux de Marie Balmary aident à comprendre très finement ce fait et ses implications dans le cadre judéo-chrétien. Et être consciemment, simplement et à volonté cet Espace grâce à quelques expériences de Vision du Soi change assez considérablement la donne. Essayez, vérifiez …

² – Réponse simple, logique, imparable … Pas besoin d’une solide assise culturelle (ni cultuelle) pour la comprendre. Mais comprendre suffit-il ? Surtout quand il est nécessaire de surmonter un conditionnement de plus en plus puissant qui nous réduit aux deux seules dimensions « corps & mental » (« corps & âme » dans la terminologie de Michel Fromaget). Quand la frustration de la dimension d’infini, de l’esprit, est si propice au « bon » fonctionnement de la société de compensation & consommation. Quand le rouleau compresseur de la déculturation numérique érode chaque jour un peu plus cette dimension fondatrice de l’homme et de l’humain … Et, reconnaissons-le aussi, quand petite enfance et névroses diverses autant que variées nous emprisonnent dans une espèce de reductio a minima …

Non, comprendre s’avère totalement insuffisant. D’où l’intérêt exceptionnel des expériences de Vision du Soi pour : 1 – VOIR et vivre par soi-même sa véritable dimension d’espace d’accueil infini et inconditionnel, de contenant ultime. 2 – valoriser cette expérience en l’intégrant peu à peu dans le quotidien jusqu’à demeurer continuellement dans la plénitude de sa vraie nature.

³ – Impossible d’expliciter ici – même si ce n’est pas l’envie qui manque ! – ce « j’ai décidé d’y croire ». Je me permets de renvoyer les lecteurs intéressés par cette question passionnante à deux ouvrages :

  • « L’homme aux statues – Freud et la faute cachée du père », pour la version longue. NB : choisir la nouvelle édition de 03/97, aux Éditions Grasset.
  • « Freud jusqu’à Dieu », pour la version courte.

Et cette formulation est sans doute un peu trompeuse : si Marie Balmary finit par « croire », c’est qu’elle a vu des filles & femmes abusées et des hommes & « pères » (…?) fautifs, fait l’expérience vivante d’accueillir leurs paroles & souffrances … Avait-elle alors le choix de faire autrement … comme Freud avait, vainement, pensé pouvoir le faire ? Ce qui bien sûr n’enlève rien à la finesse d’investigation et au courage … de celle-ci, et pas de celui-là ! Freud n’a pas été si « couillu » que cela finalement !

4 – La page « Œdipe » de wikipedia reste très incomplète si l’on ne suit pas l’hyperlien concernant son père « Laïos ». Celle-ci, bien que très courte, dit l’essentiel sur l’inconduite de Laïos et donc sur ce qui pèse sur le destin de son fils Œdipe. La responsabilité de Freud concernant la reductio a minima du mythe d’Œdipe est … maximale et … symptomatique !

Marie Balmary invite à lire un ouvrage passionnant : « Œdipe philosophe » de Jean-Joseph Goux, aux Éditions Aubier, 1990. « Ce livre est, à bien des égards, une entreprise périlleuse. » (Introduction) … tant pour l’auteur que pour ses lecteurs : vous voilà prévenus !

5 – A l’heure où l’on continue de brandir ces textes à tous propos, pour justifier des prises de positions qui s’auto-étiquettent le plus souvent « morales », en ajoutant généralement l’erreur d’interprétation à l’anachronisme, il serait bon de les lire en gardant à l’esprit que ce sont, effectivement, « des textes pour éveiller et guérir », des textes « anthropogènes » conçus (oui, je sais que là je vais me faire quelques ennemis !) pour nous aider à devenir pleinement humains.

A mon humble avis, la bonne solution consiste à les lire pour vérifier si « les experts ont bien pigé le truc ? », après avoir fait l’expérience de notre vraie nature d’espace d’accueil infini et inconditionnel.

6 – Ouahou ! Il fallait oser, même dans un journal s’adressant prioritairement à des lecteurs suisses, réputés pour leur calme légendaire !

« La Bible est une gigantesque station d’épuration de la parole »

Il n’y a qu’une occurrence d’un rapprochement aussi extra-ordinaire dans tout le wouèbe, et nous le devons à Marie Balmary ! Si les « fonctionnaires de Dieu » voulaient bien prendre cette parole au sérieux, les églises feraient nef comble chaque dimanche ! Si elles se vident de plus en plus, c’est que (presque) plus personne n’adhère aux premières lectures d’Abraham & Isaac, de Caïn et Abel, de la « joue droite », … Il est plus que temps de passer à une deuxième lecture.

A l’heure où la parole est au moins aussi polluée que la plupart des eaux, l’heure de la « post-vérité« , au moment où il n’a jamais été aussi nécessaire de « donner un sens plus pur aux mots de la tribu » (Mallarmé – Tombeau d’Edgar Poe), où ceux qui ont le pouvoir politique devraient avoir pour unique priorité de « redonner leur sens aux mots » (Confucius), nous ne pouvons que nous féliciter de lire une phrase d’une telle audace, un « projet » d’une telle modernité.

Dans le même registre et avec des outils différents & complémentaires, la Vision du Soi s’efforce aussi de dégager le sujet de pas mal de « sales » pièges du langage : en voyant – simplement, concrètement, joyeusement – que pour moi-même et sur l’évidence de l’instant présent, je n’ai pas de tête, que je n’ai jamais été « face à face » avec qui que ce soit depuis ma naissance, que tout groupe de n personnes en compte en réalité n-1, … Mais n’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez !

7 – Marie Balmary a donc audacieusement « rouvert le débat », notamment dans le chapitre 4, « La faute introuvable » d’« Abel ou la traversée de l’Éden ». Un très court extrait pour donner le ton :

« A cette doctrine du péché originel, on peut certes opposer l’indifférence et s’éloigner de tout ce qu’elle charrie comme image totalitaire du divin, dévalorisation et culpabilisation de l’homme.

Je me suis moi-même écartée de cette conception qui m’a paru incompatible avec la dignité non seulement humaine mais aussi divine. Ce dieu rusé, mesquin et humiliant, ce dieu jaloux de ses prérogatives ressemblait trop à nos peurs, à nos erreurs aussi pour que je le croie vivant ailleurs que dans nos psychismes. »

Pages 163 & 164 de l’édition 1999 chez Grasset

Il y aurait également beaucoup à dire, en lien direct avec la Vision du Soi, sur la traduction littérale : « les yeux des deux sont ouverts » (Genèse 3,7) … mais ce serait tellement plus simple de le faire au cours d’un atelier à l’aide de quelques expériences. N’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez !

« Advenir à l’humanité »« vaste programme », aurait pu dire le Général De Gaulle ! Mais avons-nous un autre choix ? Toute autre direction ne constitue-t-elle pas une impasse et une condamnable perte de temps ?

8 – Plutôt d’actualité en ce début juillet 2017, au moment ou se discute à l’Assemblée Nationale la loi d’habilitation pour « simplifier » le code du travail, …

9 – … et ou le Comité consultatif national d’éthique vient de rendre un avis favorable pour ouvrir l’accès à la PMA – jusqu’ici autorisé seulement pour les couples hétérosexuels infertiles – aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Une question assurément complexe, qui nécessiterait d’écouter et d’entendre vraiment les questions de quelques rares experts, et de Marie Balmary notamment :

« Va-ton défaire la parole pour faire la loi ? Comment donner des droits qui corrigent des injustices sans détruire le langage ? Comment faire une loi qui reconnaisse à chacun une place dans sa relation à l’être aimé sans défaire le sens des mots qui signifient ces relations ? Saurons-nous nommer les personnes présentes à l’accueil et l’éducation de l’enfant sans perdre les mots et les noms par lesquels il aura accès à son origine ? Saurons-nous inscrire l’amour sans désinscrire la vérité ? »

Extrait de « Indéfectible soutien à Marie Balmary »

Sur ce sujet essentiel elle conseille, notamment, la lecture de : « Main basse sur les vivants » de Monette Vacquin, aux Éditions Fayard 1999.

Cet auteur a également fait paraître en 2016 chez Belin : « Frankenstein aujourd’hui – Égarements de la science moderne ».

« La figure la plus terrifiante et la plus repoussante de notre temps, c’est la conjonction de l’immaturité psychique la plus complète avec les moyens d’action les plus sophistiqués »

Olivier Rey dans sa postface

Mais … gardons le moral ! « Wo aber Gefahr ist, wächst das Rettende auch ». Quelles preuves, me direz-vous, de l’existence de « quelque chose » qui pourrait nous sauver (à condition de s’en saisir) ? Au moins deux : les travaux de Marie Balmary et la Vision du Soi. Vérifiez … !

 

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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