Un vieil article – 18 novembre 1999 – paru dans le journal « La Croix » et ramené à la surface en utilisant DuckDuckGo :
Marie Balmary enquête au jardin d’Eden
« Bible et psychanalyse font-elles bon ménage ?* Depuis des années, Marie Balmary l’illustre en livrant régulièrement le résultat de ses recherches obstinées et stimulées de concert au sein du groupe « Déluge », ainsi nommé d’après le premier texte travaillé. Depuis ses débuts, il y a vingt ans, de l’eau est passée sous les ponts mais la psychanalyste aime à se transformer à chaque nouvelle investigation dans les textes bibliques en véritable enquêtrice. Elle remet sans cesse les mots sur le métier, recourant souvent aux langues anciennes, comparant les traductions et semant pas à pas des cailloux blancs à l’intention de ses lecteurs entraînés dans l’aventure de l’interprétation. Des lecteurs à maintes reprises prévenus de l’éventuelle difficulté du raisonnement symbolique dans lequel elle les entraîne mais qui déclarent la suivre.
On se souvient de l’impact de son premier essai biblique, Le Sacrifice interdit, paru en 1986, revisitant le sacrifice d’Isaac. Marie Balmary adore ouvrir des pistes nouvelles et parfois dérangeantes tant les textes qu’elle scrute et ausculte sans relâche sont aux fondements de nos questions. Marie Balmary se plonge alors dans le plus connu, comme peut l’être apparemment le récit de la Genèse, pour étudier ce qui est vraiment dit. Et donc à ce qui n’est pas dit, se retrouvant sur le terrain fréquenté par d’autres chercheurs comme les exégètes.
« Une affaire » jamais réglée
Avec Abel ou la traversée de l’Éden, Marie Balmary enquête sur la genèse d’une mort, d’un crime.
« Le plus célèbre du monde, explique-t-elle, dont le coupable est connu depuis trois mille ans. »
Une « affaire » pourtant jamais réglée. C’est l’accueil fait à l’offrande des deux frères qui déclenche tout. Pourquoi alors le dieu de la Genèse refuse-t-il l’offrande de Caïn alors que celle d’Abel est agréée ? Il aura fallu près de dix ans d’enquête à Marie Balmary pour répondre pour son compte à cette question et ainsi faire entendre de manière nouvelle le récit biblique.
Pour l’essentiel, Caïn n’est pas présent lui-même dans son offrande. Ses fruits sont anonymes. Il est sans visage et sans parole. Abel, l’enfant de rien, lui offre le meilleur de lui-même et accède ainsi à la parole divine en lui. Inaugurant son investigation avec le récit de la parabole des talents (Matthieu 25, 14 à 30), Marie Balmary souligne combien sa lecture introduit dans une autre logique :
« Il n’y a pas de parvenus dans ce royaume, il n’y a que des advenus. »
Les deux serviteurs fidèles de l’Évangile sont anoblis puisqu’ils se sont approprié le don et ont reçu plus encore. Le troisième homme « qui n’a pu faire sien ce qu’il avait reçu et a perdu même le premier don ». Un dieu qui désire non des serviteurs mais d’autres dieux donne dès l’origine à l’humain l’épreuve d’accès à la vie divine.
De sa rumination du chapitre IV de la Genèse et de son expédition biblique, Marie Balmary livre d’autres « associations libres », selon son expression, au sens où elles passent les portes d’un texte. Les terrains choisis sont fertiles. Par exemple que le péché originel souvent invoqué comme justification de nos souffrances ne figure pas dans le texte et que le mot faute désigne ce qui menace l’homme et non ce qu’il commet. Quant au serpent de la tentation, il s’agit d’une formidable leçon de démythologisation. Le serpent qui « prétendait savoir la nourriture des dieux – l’arbre de la connaissance et du mal -, ne mangera lui-même que la poussière ».
Quant au jardin de l’Éden, plutôt que le paradis perdu, Marie Balmary préfère en parler comme du lieu de l’épreuve première par laquelle les créatures humaines accèdent à la parole, la filiation, la fraternité. Marie Balmary actualise son propos à l’humanité de la déclaration des droits de l’homme où la fraternité universelle n’est pas psychiquement possible. Dans son exploration qui n’est pas sans faire écho à celle, anthropologique, elle, de René Girard, Marie Balmary invite à ne pas suivre les modes et courants dominants. Elle sait devoir en payer le prix. »
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Un article bienveillant à l’occasion de la parution d’« Abel ou la traversée de l’Éden », l’occasion de compléter le projet consistant à rassembler sur volte-espace une bonne part (Je n’ose pas écrire « tout » !) de ce qui concerne une recherche majeure … Plus modeste que celle de René Girard en apparence, mais non moins fertile & utile.
J’ai renoncé à batailler pour parvenir à faire évoluer sa page wikipedia, qu’un quidam s’est appropriée avec un sens très aigu du moi-je … Consultez donc plutôt « Balmary Marie » sur volte-espace.pedia !
Je rappelle que les liens, sur- et sous-lignages ainsi que les questions ci-dessous sont de ma seule responsabilité.
Est-ce que le fait de ne pas reconnaître notre « Visage Originel », de refuser la « silencieuse coïncidence » avec notre « autoportrait » ne risque pas de faire de nous des « Caïn », « sans visage et sans parole », meurtriers de nos frères … ?
La « logique » ultime de la zone périphérique « je suis humain » du dessin ci-dessous ne serait-elle pas la violence ? Un des fondements de cette « logique » ne serait-il pas le fait de « suivre les modes et courants dominants » ?
Pour éviter que la prophétie de Leonard Cohen : « I have seen the future Baby It’s murder » ne continue de s’actualiser, il n’y a qu’« un seul espoir » … et, heureusement, une « entrée principale ». Essayez, vérifiez !
* « Bible et psychanalyse font-elles bon ménage ? » Une partie de la réponse dans « Un grand coup de balai dans le Ciel » !
Cordialement