« Il arrive que nos yeux voient ce qu’ils ne devraient pas voir (0). Un instant de fatigue et notre vue se brouille. Mais se brouille-t-elle vraiment ? Si nous le croyons, c’est que ce que nous voyons nous déconcerte.
Si alors nous regardions ce que réellement nous voyons¹. …
Le processus ordinaire de la vision, cette “mise au point” qui se produit automatiquement, on l’appelle “accommodation”. Cela est tout dire, dénonçant l’artifice inconscient qui consiste à accommoder les choses à notre perception, afin de les rendre plus facilement assimilables par notre esprit limité et conditionné².
Mais que se passerait-il si nous n’accommodions plus ? Si, passant outre les exigences tyranniques de notre esprit³, nous cessions de vouloir adapter le monde à nous-mêmes et décidions de nous adapter à lui (4). Que se passerait-il en vérité ? …
Notre corps, nos sens en savent bien plus que notre esprit³ qui trie et élimine, triture, malaxe et façonne à son gré ce que les sens lui communiquent, nous présentant un amalgame qu’il entend nous faire prendre pour la seule réalité, ce que nous ne manquons pas d’accepter parce que cette opération frauduleuse nous dispense de toute recherche, de tout questionnement, lesquels seraient nécessairement interminables et incertains, écarte le vertige qui nous saisit devant ce gouffre sans fond au bord duquel nous risquions de trébucher (5).
Mais si, courageusement, nous refusions d’être dupes plus longtemps, si nous cessions de choisir, donc de rejeter, serions-nous perdus ou sauvés ? (6) »
« Le bonheur-du-jour »
Jeudi 19 avril
Cordialement
0 – C’est vrai. Mais que se passe-t-il alors, en général ? Une citation de W. Churchill s’avère utile :
Même si à l’issue d’un atelier de Vision du Soi selon Douglas Harding vous décidez de vous « éloigner d’un pas vif, comme si de rien n’était », vous n’aurez pas perdu votre temps, une graine aura été semée, qui ne demandera que des conditions un peu plus favorables pour croître.
¹ – « Si alors nous regardions ce que réellement nous voyons. … » Une très grande partie du travail de Douglas Harding a justement consisté à faire en sorte que cette nécessité absolue devienne simple et efficace :
- principalement par ses géniales expériences
- mais aussi à l’aide du dessin, voire de la photo
- et enfin à l’aide d’une kyrielle de citations
² – Il est parfois reproché à la Vision du Soi son excès de simplicité – voire son simplisme pour ses plus farouches opposants. Est-ce que ces défauts ne seraient pas plutôt le fait de ce processus réflexe d’accommodation, dont la responsabilité incombe non à « l’esprit » mais au mental – ou alors à un « esprit » confusément entendu au sens de mental.
Le mental fonctionne – à l’insu de notre plein gré ! – comme une machine, en mode automatique. Est-ce digne d’un être humain intelligent & conscient ?
Le mental, « limité et conditionné », est l’inverse exact de l’Esprit, illimité & inconditionné. Cf. la note n° 3 et la carte de la note n° 6.
³ – Je l’ai déjà écrit bien souvent, mais sans utiliser la tripartition « Corps & Âme – Esprit » il est impossible de voir clair et de comprendre de quoi l’on parle – et ce même si l’Esprit demeure de l’ordre du mystère et ne peut être défini ou compris. Il me semble que ces deux occurrences supplémentaires viennent confirmer la règle.
Les « exigences tyranniques » sont celles du mental – de l’âme au sens ancien du mot, pas de l’esprit. Et « notre corps, nos sens en savent bien plus que notre » … mental.
4 – « Que se passerait-il en vérité ? » L’éveil, la libération, la nouvelle naissance, …
Nous cessons de « vouloir adapter le monde à nous-mêmes ou de nous adapter à lui », nous devenons subitement espace d’accueil illimité & inconditionnel du monde, nous sommes le monde … « Le sage a pour corps l’univers entier » comme le dit l’Upanishad.
5 – Cette notion de fraude correspond à l’étymologie du mental … menteur. Mais est-ce que la recherche « serait nécessairement interminable et incertaine », est-ce que « nous serions obligatoirement saisit de vertige devant ce gouffre sans fond » ? Le plus simple consiste encore à participer à un atelier de Vision du Soi pour vérifier.
6 – Persévérer dans l’erreur de s’appuyer exclusivement sur le « petit » de la zone « je suis humain » du dessin ci-dessous, c’est vouloir rester « dupe », la « perdition » – ou damnation. Il n’y a de « salut » qu’en acceptant, « courageusement » et humblement de voir « the big picture », d’être la totalité de la carte – Rien & Tout – d’assumer notre « autoportrait », notre Visage Originel.