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La valeur de la défaite – Pier Paolo Pasolini

C’est dans la cuisine d’Alessandro – le chef du restaurant « Le Marmotte » (0) – que j’ai découvert en février dernier le texte ci-dessous. Il avait immédiatement sa place sur volte-espace (et partout ailleurs …), bien sûr, mais souvenez-vous que derrière volte-espace il n’y a que mes dix doigts et … mon absence de tête !

C’est la (funeste) conclusion du mondial 2018 de football¹ qui m’a rappelé que j’avais ce texte dans mes brouillons et qu’il convenait de le partager et de le commenter … un poco !

&

« Je pense qu’il faut éduquer les nouvelles générations à la valeur de la défaite (déconfiture, faillite, …).

À la manière de s’en occuper (à sa conduite, … mais, par pitié pas à sa « gestion »).

À l’humanité qu’elle développe.²

À construire une identité³ capable de participer à une communauté de destin, où chaque personne peut échouer et recommencer sans que sa valeur et sa dignité en soient diminuées.

À ne pas devenir un arriviste qui joue des coudes pour faire sa place dans la société, qui piétine le corps des autres pour arriver le premier.

Surtout dans ce monde de vainqueurs vulgaires et malhonnêtes, de prévaricateurs fourbes et opportunistes, de bonnes gens qui comptent, occupent le pouvoir, confisquent le présent, sans parler du futur, tous ces névrosés du succès, du paraître, du devenir (4).

Dans cette anthropologie du vainqueur, je préfère, et de loin, celui qui perd.

C’est un exercice qui me convient bien. Et me réconcilie avec le peu de sacré (5) qui est en moi. »

Pier Paolo Pasolini

Cordialement

 

0 – Si vous allez en Italie, allez donc faire un tour dans le Val Maira. C’est un coin superbe, encore sauvage, pas dénaturé par l’industrie (lourde) de l’or blanc & vert. Et si vous allez dans le Val Maira, allez donc faire un très bon repas chez Annalisa et Alessandro, allez boire un coup à l’Osteria della Gardetta chez Maria Luisa et Rolando.

Rappel : la Première Personne compte toujours à partir de 0, moyen habile (upaya) de, notamment, transformer les groupes de quatre personnes en groupe de trois … De réduire à néant le concept erroné d’« environnement ». De commencer à échapper à la « contagion mimétique » (René Girard) d’un face-à-face … aussi impossible que nuisible. Essayez, vérifiez … n’en croyez pas un traître mot !

La Première Personne, c’est celle qui a traversé l’ultime défaite, qui a perdu … tout ! Mais, en voyant très clairement & consciemment qu’Ici au Centre Elle est vide, « rien », espace d’accueil illimité et inconditionnel, contenant ultime, elle explose instantanément aux dimensions de tout l’univers, elle est l’univers ! C’est le jeu de qui perd gagne ! Essayez, vérifiez, n’en croyez pas un traître mot.

Et si ce jeu vous inquiète un tantinet, rappelez-vous de la seule alternative : qui gagne perd … !

¹ – « Le football, une peste émotionnelle », selon le beau titre du livre de Jean-Marie Brohm et Marc Perelman. On ne prête bien sûr qu’aux riches, mais soyons juste et mettons dans un même sac (de linge très sale : dopage, fraude fiscale, corruption, simulation, etc …) la totalité du sport-spectacle, ce sport-opium du peuple : tennis, courses auto/moto/bateau – mobiles, cyclisme, ski, … etc. Pour un tel inventaire il faudrait un Prévert !

Pasolini n’aurait sans doute pas été très heureux de cette association, lui qui, étonnamment, était aussi un fervent supporter de la religion majoritaire en Italie : le … calcio ! Comme l’Italie ne participait pas à la compétition 2018, il m’aurait sans doute accordé … l’absolution !

² – Cette éducation serait d’autant plus nécessaire que naître c’est en fait, comme le disait si bien Douglas Harding, « entrer dans le couloir de la mort ». Le vivant, c’est – d’abord & essentiellement – ce qui finit par mourir et qui a la possibilité d’en prendre conscience. Chaque être humain le sait d’instinct et, malgré l’overdose continuelle de divertissement (sportif notamment, mais pas uniquement …) que Big Mother lui injecte en continu, il a bien du mal à ne pas y penser. Certains marchent à fond dans la « névrose du succès », d’autres se droguent plus classiquement, d’aucuns se suicident …

Il n’y a qu’un seul remède à cette douloureuse condition humaine : « mourir » avant de mourir ! Mourir à l’illusion de n’être qu’une petite troisième personne, rien qu’un corps & mental, pour renaître à Ce que nous sommes vraiment : Première Personne du Singulier du Présent, espace d’accueil illimité et inconditionnel, contenant ultime, « corps & âme – esprit », … Peu importe le nom que vous choisirez de donner à cette Réalité, l’important c’est de la vivre.

³ – On en revient toujours à la même question, celle de notre identité. Et, au risque de me répéter, aucun de nous n’est cette petite chose périphérique incomplète de la zone « je suis humain » du dessin ci-dessous. Là il n’est question que d’identifications. Chacun est infiniment plus vaste, grand, spacieux … En tant que Centre et vu du Centre, du « Je Suis », chacun de nous est en fait la Totalité. Au début cela effraie un peu, mais on finit par s’habituer … ! Essayez, vérifiez, n’en croyez pas un traître mot.

4 – Ce paragraphe me semble particulièrement bien décrire le Don Juan de l’air du champagne

5 – Je ne connais pas assez la langue italienne, ni l’œuvre de Pasolini pour développer ce « il mio sacro po » ; mais, bien au-delà d’une « option préférentielle » pour les pauvres ou les perdants, la « défaite » évoquée ci-dessus dans la note ² : « mourir » avant de mourir, se résoudre à accepter, et les étroites limites du « petit » périphérique que je parais être, et l’immensité centrale du « Grand » que « Je Suis », me semble effectivement constituer une sorte de plus petit dénominateur commun du « sacré ».

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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