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Un fil qui ne change pas

Voici encore une autre réflexion de Carolyn Baker, extraite de la deuxième partie de son livre « L’effondrement ». Ces 52 réflexions hebdomadaires sur l’effondrement de la civilisation industrielle sont publiées sous la rubrique « Carolyn Baker » du site internet du Réseau Transition Québec (0).

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« Il y a un fil que vous suivez¹. Il traverse les choses qui changent. Mais lui ne change pas. »

William Stafford

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« Peut-être que rien dans ces temps troublés n’est plus urgent² que d’être conscients que le fil vit en nous et de ressentir sa présence dans nos vies. Pendant les périodes de changements vertigineux et effrayants, le fil demeure, toujours là, prêt à être touché et à nous entraîner.

Ce faisant, nous ressentons notre connexion avec les ancêtres, la sagesse ancienne, la vérité intemporelle et les restes éternels du sacré.
Notre travail n’est pas seulement de rester en contact avec le fil, mais de l’utiliser pour retisser et refaire notre monde³ avec les fibres effilochées d’un vêtement que nous avons hérité des Lumières, un vêtement qui a fini par devenir un poids étouffant sur nos âmes, une couverture séduisante, mais triste.

Stafford nous assure que tant que nous tiendrons le fil nous ne pourrons nous perdre. Tout s’effondre ; les gens remettent nos choix en question, concluent peut-être même que nous sommes fous. Pourtant, nous tenons à notre fil et aidons nos congénères humains à trouver le leur (4). Quand nous nous sentons dépassés, nous nous accrochons au fil et lorsque notre voisin est près de succomber à la folie, nous lui offrons un poème, une chanson, une histoire, ou une autre belle chose pour apaiser et adoucir sa terreur, quelque chose qui lui rappellera le fil qu’il n’a pas retrouvé, mais n’a jamais perdu. En chérissant le fil, nous comprenons de mieux en mieux combien nous sommes tous reliés intimement ensemble dans un vêtement qui s’appelle la vie. En fait, c’est ce que des périodes turbulentes ont toujours enseigné aux humains (5) . »

 

Cordialement

 

0 – Les initiatives de transition sont nées en Angleterre à l’initiative de Rob Hopkins. Il existe donc un site anglais, of course, mais aussi des sites français, belge, locaux …

La transition doit beaucoup à Ernst Friedrich Schumacher évoqué ici et sur volte-espace.

Cette démarche intelligente, nécessaire et, au final, incontournable intègre la dimension psychologique, mais encore insuffisamment à mon avis la dimension première qui est spirituelle. La Vision du Soi selon Douglas Harding pourrait contribuer à combler cette lacune …

¹ – Image classique que ce « fil » immuable qui traverse et relie … tout, pour évoquer cette « non-chose » centrale, cet espace illimité et inconditionnel qui accueille … tout, ce contenant ultime de … tout.

Image à laquelle je préfère celle de l’axe vertical qui croise le plan de l’horizontale en chacun de ses points, telle qu’évoquée notamment par Bernard Besret dans « Confiteor », avant lui par Karlfried Graf Dürckheim dans « Méditer, pourquoi, comment ? », et par bien d’autres.

Mais, même si elle peut constituer une aide importante, peu importe l’image. Ce qui importe c’est de vivre la réalité de ce qu’elle représente. Là, en matière de transmission spirituelle, la Vision du Soi selon Douglas Harding constitue une percée véritablement décisive. Voir clairement mon absence de tête Ici au Centre vaut désormais pour moi tous les « ressentis » du monde. Mais n’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez !

² – Rien n’est effectivement plus important & urgent, pour reprendre les termes d’une matrice de décision désormais classique.

A force de considérer, avec le Maslow tardif notamment, que « la sagesse ancienne, … la vérité intemporelle … le sacré », l’immuable, la transcendance … – peu importe le nom –  constituait le dernier étage de la célèbre pyramide, la cerise sur le gâteau de la vie, et qu’il convenait de mettre d’abord en place tous les niveaux sous-jacents, nous avons globalement fini par passer à coté de l’essentiel.

Et nous voilà désormais en ces « temps troublés » de l’effondrement, qui proviennent pour une très grande part de cet oubli de l’Être, du Je Suis. Vont-ils offrir une opportunité de placer l’essentiel au centre, comme fondement véritable de tout le reste … ? Comme en tous autres domaines, il n’y aura rien d’automatique, la qualité de conscience individuelle sera décisive.

³ – On ne se méfie jamais assez des « re ». En d’autres temps Paul Valéry nous avait exhorté – en vain – à la prudence :

« Prenons garde d’entrer dans l’avenir à reculons … C’est pourquoi je n’aime pas trop que l’on parle de reconstruire la France : c’est construire une France que j’aimerais que l’on voulût. »

« Regards sur le monde actuel » – « Respirer »

Et de plus anciens que lui nous avaient déjà avertis des risques consistant à re-coudre une pièce sur un vêtement :

« … On ne coud pas une vieille pièce à un vêtement neuf. Cela provoquerait la déchirure. »

Évangile de Thomas, logion 47

La situation actuelle nous demande d’inventer une organisation sociale radicalement nouvelle et cohérente, assurant une place véritablement centrale à la dimension intemporelle individuelle. Dit comme cela, ça n’a pas l’air du tout évident … mais la Vision du Soi pourrait aider.

Cf. aussi la sage, modeste et réaliste réflexion d’Albert Camus dans son Discours de réception du Prix Nobel de littérature, prononcé à Oslo le 10 décembre 1957 :

« … Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse.« 

Cf. aussi l’ouvrage d’Abdennour Bidar, « Les Tisserands ».

4 – Cette phrase est tout à fait en phase avec Transformation personnelle & Transformation sociale. Il n’est pas possible d’aider « les autres » (entre guillemets, parce que justement, une fois passé « sur l’autre rive », ils n’en sont plus vraiment …) tant qu’on n’est pas soi-même relié par ce fil, bien positionné sur l’axe, centré, etc … Et quand on l’est véritablement, il n’est plus possible de ne pas les aider. Rien n’est plus concret et altruiste que la réalisation spirituelle individuelle … ce que semble avoir complètement oublié notre société libérale de marché, notre grand bazar techno-scientifique.

5 – Ce qu’il serait sans doute plus prudent d’écrire, c’est que les « périodes turbulentes » n’ont jamais empêché les êtres véritablement humains de se relier à cette dimension intérieure. Les périodes antérieures de troubles ont surtout fait le lit de l’inhumanité … Est-ce que cela va changer … ? L’histoire ne nous donne guère d’exemple …

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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