« C’est une étrange et longue guerre que celle où la violence essaie d’opprimer la vérité.
Tous les efforts de la violence ne peuvent affaiblir la vérité, et ne servent qu’à la relever davantage.
Toutes les lumières de la vérité ne peuvent rien pour arrêter la violence, et ne font que l’irriter encore plus.
Quand la force combat la force, la plus puissante détruit la moindre ; quand l’on oppose les discours aux discours, ceux qui sont véritables et convaincants confondent et dissipent ceux qui n’ont que la vanité et le mensonge : mais la violence et la vérité ne peuvent rien l’une sur l’autre.
Qu’on ne prétende pas de là néanmoins que les choses soient égales : car il y a cette extrême différence, que la violence n’a qu’un cours borné par l’ordre de Dieu¹, qui en conduit les effets à la gloire de la vérité qu’elle attaque, au lieu que la vérité subsiste éternellement, et triomphe enfin de ses ennemis ; parce qu’elle est éternelle et puissante comme Dieu même. »
« Les Provinciales », Lettre XII
Cette citation figure en exergue d’ « Achever Clausewitz », livre² de René Girard que j’ai acheté le 16 novembre 2015 en rentrant du Forum A Ciel Ouvert.
Étant à la fois impliqué dans le bon déroulement de cet événement et animateur de deux ateliers de Vision, je ne m’étais tenu informé des attentats de Paris qu’à minima, faute de temps. Et peut-être aussi par désir de tenir quelque temps à distance toute cette bêtise, cette ignorance, cette inconscience, cette violence, …
Ce livre d’un penseur original, courageux et tenace, récemment décédé, s’est naturellement imposé à moi, parce que d’une actualité brûlante³. Ainsi, suite aux actes terroristes du 13 janvier, est-ce qu’il va être possible d’éviter « la montée aux extrêmes » … ? Est-ce que les démocraties vont parvenir, avec toute leur puissance et leur défaut de réflexion quasi systématique en ces domaines, à ne pas foncer tête baissée dans le piège tendu par daech, qui lui a tout intérêt à enclencher l’engrenage de la violence mimétique … ? Rien ne me semble moins sûr …
La citation de Pascal est à lire soigneusement, deux fois plutôt qu’une. En s’efforçant de demeurer bien centré. La violence n’est pas seulement là-bas, pas plus que la vérité n’est uniquement ici. C’est beaucoup plus compliqué que cela dès que l’on prends le temps de remonter presque un siècle en arrière jusqu’aux Accords Sykes-Picot. Espérons que toute la violence, passée, présente et, malheureusement, encore à venir serve effectivement in fine la cause de la « vérité ».
Cette « vérité », « éternelle et puissante », cette « lumière » que les « ténèbres » ne sauraient saisir, René Girard peut nous aider à la lire, notamment dans les Évangiles, tout comme Marie Balmary le fait à sa manière également. Et certainement comme quelques autres chercheurs que je connais moins.
Mais la Vision du Soi selon Douglas Harding peut nous y conduire, simplement, concrètement, utilement … et sans doute beaucoup plus rapidement. Dans un deuxième temps, les lectures pourront s’avérer précieuses pour nourrir et valoriser cette claire vision initiale.
Mais n’en croyez pas un traître mot, essayez, l’urgence se fait plus pressante chaque jour.
Cordialement
¹ – En 1656 Pascal ne peut pas ne pas parler de « Dieu ». Si ce mot vous gène aujourd’hui, trouvez l’équivalent qui vous agrée.
² – Écrit en collaboration avec Benoît Chantre
³ – Jean-Claude Guillebaud a écrit « Le tourment de la guerre », à paraître le 6 janvier 2016 (Éditions L’iconoclaste). Il s’agit d’une réflexion sur les répercussions de la guerre dans les sociétés à travers les siècles, où il fait longuement référence à « Achever Clausewitz ».