« L’une des preuves les plus éloquentes de la validité de la Science-3 est l’éventail et l’exactitude de ses prédictions, depuis le minutage exact des éclipses et du passage des comètes jusqu’aux prévisions météorologiques, de l’évaluation exacte de la trajectoire d’une balle par grand vent à la programmation détaillée d’un tir lunaire. Il est certain que la Science-1 ne peut pas rivaliser avec cela. …
Certes, elle ne peut rien me dire sur l’avenir des autres là-dehors – ça, c’est l’affaire de la Science-3. Mais elle me dit tout sur l’avenir (et le passé) de Moi-même ici, de cette Réalité claire comme le cristal, totalement distincte de ses apparences nébuleuses, cette Réalité qui est en fait la Réalité de tous (0), cette Histoire Intérieure qui est en fait l’Histoire Intérieure de tous. La Science-1 se mêle de ce qui la regarde : elle ne fait qu’une seule prédiction, mais cette prédiction est compréhensive¹, absolument précise, claire, sans limite dans le temps et décisive, parce qu’elle concerne ce que les choses sont, et non pas ce qu’elles paraissent être. Et ce qu’elles sont est immuable, le toujours-ainsi². Cette Identité centrale, fondamentale, transparente, est la même dans tous les êtres, à jamais. … Voir cela (le comprendre seulement ne sert absolument à rien), voir cela c’est voir à travers le temps dans l’éternité, maintenant. Et cette ultime prédiction est la réalisation du Repos et de la Paix au Cœur commun de toutes les créatures³.
L’alternative, c’est l’angoisse sans cesse grandissante, l’angoisse qui augmente avec l’intelligence, la responsabilité et le savoir. …
Que faire alors ? Incapable de retourner au stade de l’enfant relativement insouciant parce qu’il n’a pas la notion du temps, notre seul remède consiste à avancer vers le stade du sage à l’âme d’enfant pour qui le temps est l’éternité, qui est totalement insouciant parce qu’il voit que Ce qu’il est maintenant se situe au-delà (4) de la vie et de la mort et de tout changement. Toutes les choses périssent, mais Cela qui est Non-chose demeure. …
Tout revient donc à la question cruciale de ma véritable identité (5). Si je tiens absolument à faire de moi, ici, un objet, une chose, une troisième personne, je suis consumé par un millier de peurs et serais plus heureux mort. Mais si j’abandonne cette habitude irréaliste et peu fructueuse et si je reviens à Moi, je vois que je ne suis jamais sorti de ce merveilleux Abîme, qu’avant qu’Abraham fût, je suis (6) – avant la première galaxie et le premier atome, avant le temps lui-même. Exactement ici et maintenant, en ce lieu même qui est l’origine de la tempête du temps et du changement, Je suis Chez Moi, sain et sauf. Pourquoi quitterais-je ce Refuge (7) ? »
Cordialement
0 – Qu’ils en soient conscients ou non, qu’ils le veuillent plus que tout ou non, qu’ils le refusent avec la dernière énergie ou non … La Vision du Soi selon Douglas Harding est essentiellement démocratique. Quant à savoir si nos « démocraties » favorisent véritablement l’accès à la Vision ou non … c’est une toute autre question !
Rappel : la Première Personne compte toujours à partir de 0, moyen habile (upaya) de, notamment, transformer les groupes de quatre personnes en groupe de trois … De réduire à néant le concept erroné d’« environnement ». De commencer à échapper à la « contagion mimétique » (René Girard) d’un face-à-face … aussi impossible que nuisible. Essayez, vérifiez … n’en croyez pas un traître mot !
¹ – « Compréhensive » n’est sans doute pas la meilleure traduction de ce qui est vraisemblablement (je ne dispose pas de l’édition en anglais) à l’origine « inclusive » ou « all inclusive ». La prédiction de la Science-1 n’est pas partielle mais totale, globale : elle concerne tous & tout. Ce qui ne la rend pas totalitaire pour autant !
² – Ce « toujours-ainsi » a sans doute été inspiré à Douglas par la notion bouddhiste de « tathata », généralement rendue par « ainséité ». Mais peu importe, au fond … !
A cet endroit du texte se trouve un renvoi vers la citation ci-dessous :
« Tout ce qui a forme, son, couleur peut être classé dans la rubrique choses. Mais on peut atteindre le sans forme et vaincre la mort. Comment de simples choses peuvent-elles se comparer à ce qui possède l’éternité ? »
³ – A cet endroit du texte se trouve un renvoi vers la citation ci-dessous :
« Tant que l’homme vit dans l’univers du temps et des lieux, des nombres et des quantités, il n’est pas tel qu’il devrait être, il n’est pas vrai. »
Eckhart
La « vérité » de l’homme consiste à être cet « espace d’accueil illimité et inconditionnel » – que la Vision du Soi nous permet de Voir et d’être, au moins momentanément – et si concrètement, simplement, joyeusement -, à demeurer dans le « repos », en « paix » … avec soi-même, la nature et tous les autres êtres vivants. … Vous commencez quand ?
4 – Je préfère définitivement « l’en-deçà » – et … le « vin d’ici » ! – à « l’au-delà ». Cette dernière formulation est définitivement trop chargée d’histoire(s). Elle invite à aller vers plus, mieux, alors que qu’Ici au Centre tout est déjà là de toute éternité, impossible à comprendre et si simple à Voir.
5 – Il n’y a au fond qu’une seule question : qui & que suis-je ? Mais comment se fait-il qu’elle soit autant négligée ? Pourquoi n’est-il partout question que d’identifications périphériques, sottement et faussement regroupées sous le terme « identité », et – quasiment – jamais de notre véritable identité centrale, de notre « Visage Originel » ?
Il s’agit pourtant de La réponse à de très nombreux problèmes …
6 – Évangile de Jean 8, 58 :
« Jésus leur dit : En vérité, en vérité, je vous le dis : Avant qu’Abraham fût, je suis.
Εἶπεν αὐτοῖς ὁ Ἰησοῦς, Ἀμὴν ἀμὴν λέγω ὑμῖν, πρὶν Ἀβραὰμ γενέσθαι, ἐγώ εἰμι.
NB : Jean-Yves Leloup a beaucoup insisté sur la force de cet « ego eimi », récurrent tout au long de cet évangile, qu’il conviendrait de souligner a minima par des majuscules : « Je Suis ». Au plus loin de certaines traductions qui se contentent parfois d’un bien faible « c’est moi ». Non mais allo quoi … !
7 – Autre clin d’œil au bouddhisme avec ce mot « refuge ». « Prendre refuge dans les trois trésors » que sont le Bouddha, le Dharma et la Sangha – l’Éveillé, la Loi et la Communauté – est une parole inaugurale forte pour toute personne qui aspire à suivre ce Chemin.
Mais, sa formulation : « je prends … j’ai pris … » conjugue étonnamment toute la puissance illusoire accordée au temps. Celle de Douglas, « Pourquoi quitterais-je ce Refuge ? », est beaucoup plus fidèle à la réalité de notre éternelle – c’est-à-dire située en-deçà du temps – Vraie Nature … de Bouddha !
Un atelier de Vision du Soi permet de Voir – simplement, concrètement, joyeusement – que nous demeurons dans ce « Refuge », dans ce « Royaume » … Pourquoi s’obstiner à prétendre que ce n’est pas le cas … ? Essayez, vérifiez.