« D’abord, vous savez, une nouvelle théorie est attaquée comme absurde. Puis on admet qu’elle est vraie, mais évidente et insignifiante ; finalement, elle semble si importante que ses adversaires proclament qu’ils l’ont découverte eux-mêmes. »
Le Pragmatisme¹
Flammarion, collection Champs, octobre 2007.
Cette citation figure dans un texte des plus intéressants de Michel Cazenave : « Jung hérétique ? »² Et elle m’a, bien sûr, immédiatement fait penser à la Vision du Soi selon Douglas Harding.
Mais la difficulté évoquée par William James est en quelque sorte redoublée avec la Vision du Soi, qui est beaucoup plus qu’une simple « théorie ». Son principal « adversaire » se trouve souvent en nous-même, ou du moins au cœur de ce « petit » que nous prenons illusoirement pour la totalité de nous-mêmes. A moins de valoriser très sérieusement la Vision du Soi, nous courrons le risque qu’elle demeure « absurde » ou « insignifiante », même après avoir clairement vu Qui nous sommes vraiment lors d’une expérience, cet Espace d’accueil inconditionnel et illimité …
Une deuxième citation, de Marc-François Lacan³, prolonge, un peu plus loin dans le texte, celle de William James :
« Il faut ajouter ceci : chaque fois qu’un homme est porteur, non d’un savoir à communiquer, mais d’une parole invitant à chercher la vérité et, pour cela, à l’écouter, il se heurte à un refus qui se masque souvent derrière une accusation : “Ce qu’il dit est impossible à entendre.” (Voir Évangile selon saint Jean, 6, 60). » (4)
La Vision du Soi que Douglas Harding nous a si généreusement offerte dépasse infiniment la simple communication d’un « savoir ». Sa « parole » nous invite à trouver, à voir parfaitement, la vérité que nous n’avons jamais cessé d’être. Mais n’en croyez surtout pas un traître mot, venez plutôt vérifier par vous-même lors d’un atelier.
Cordialement
¹ – « Pragmatism: A New Name for Some Old Ways of Thinking », 1907. L’introduction d’Henri Bergson mérite une lecture – en ligne sur Gallica – attentive.
2 – Ce texte se trouve dans « Jung revisité II – Jung et le religieux », éditions Entrelacs 2012. Il s’agit également de la préface à « Jung, la religion d’un hérétique » de Luc Nefontaine aux éditions EME (Bruxelles) 2010
³ – A propos de son frère Jacques, dans une lettre à Jacques Sédat du 10 septembre 1981. L’avant-propos du merveilleux livre de Marie Balmary, « Le moine et la psychanalyste », dit sans doute l’essentiel sur Marc-François Lacan :
« Liberté et joie caractérisaient cet homme lumineux. »
Et si vous désirez aller plus loin avec Marc-François Lacan, deux de ses ouvrages sont disponibles chez Albin Michel :
- « Dieu n’est pas un assureur », avril 2010
- « La vérité ne s’épuise pas », septembre 2010
4 – N’allez pas croire que je veuille en remontrer à Jacques Lacan, mais la citation de Jean 6, 60 est assez différente d’une « accusation » :
« … Cette parole est dure ; qui peut l’écouter ? »
[… Σκληρός ἐστιν οὗτος ὁ λόγος: τίς δύναται αὐτοῦ ἀκούειν;]