Voici quelques extraits d’un texte de Leili Anvar datant de 2012, qui clôt le Monde des Religions n° 100, paru en mars-avril 2020 et intitulé : « Nos plus belles rencontres en 100 numéros ».
« Je ne suis pas sûre que les religions aient un grand avenir devant elles, du moins si l’on entend par “religion” l’ensemble des rituels, des croyances et des dogmes partagés par une communauté. Je crois plutôt que l’avenir sera spirituel. Sinon, il ne sera pas radieux mais terne et vidé de tout sens, et il ne méritera pas ce beau nom d’“avenir”. Or, le spirituel ne peut advenir que si l’on tourne la page du dogmatisme, qu’il soit religieux ou athée. …
Le dieu qui gît dans le tombeau des églises, des synagogues, des mosquées et des temples est une représentation humaine du divin et ce dieu-là, oui, est voué à mourir. Les soubresauts de violence qui tentent de le réanimer n’y pourront rien. Ce qu’il faudrait pour que l’humanité s’apaise, c’est faire le deuil de ce dieu inventé. Je crois que de la mort des religions humaines, des dogmes sclérosés, des institutions décrépites naîtra peut-être, enfin, le spirituel ou la religion, celle qui englobe toutes les autres qui n’en sont que des facettes historiques. …
J’ai la naïveté de croire que les hommes retrouveront le sens du sacré, non pas pour massacrer ceux qui ne pensent pas comme eux, mais pour respecter la vie sous toutes ses formes et dans son infinie variété. Je crois au bout du compte, malgré les soirs de doute et les matins gris que l’amour sera plus fort que la mort. Les poètes, les mystiques, les grands sages du passé nous montrent la voie. A nous de leur emboîter le pas pour construire le monde qui viendra. »
Le Monde des Religions n° 55
Septembre – octobre 2012
Cordialement
Pas grand chose à dire à propos de ce texte superbe et courageux. Mais peut-être ajouter le grain de sel de la Vision du Soi selon Douglas Harding à propos d’une de ses phrases-clés :
« La foi, c’est croire qu’il y a une dimension transcendante qui nous dépasse et nous englobe, une dimension qui donne tout son rayonnement à l’immanence. »
Douglas aimait à dire qu’il était « short in faith », et comme lui je suis un « homme de peu de foi ». D’autant plus que la foi a généralement tendance à fluctuer au gré des événements. Si la foi, cette fameuse pistis [πίστις], consiste à avoir la « certitude des choses invisibles », alors comment ne serait-elle pas mieux servie que par le fait de voir – simplement, concrètement, joyeusement – cette « dimension transcendante qui nous dépasse et nous englobe » ? Voir que cette « dimension » est autrement plus constitutive de nous-même que la « petite troisième personne » exilée dans la zone « je suis humain » du dessin ci-dessous :
Voir qu’il s’agit là de notre « autoportrait ».
Voir que nous sommes d’abord « contenant ultime » avant d’être un contenu périphérique.
Toute la démarche de la Vision du Soi, dans le prolongement de la « Vision » initiale, n’a d’autre sens que d’établir aussi solidement que possible cette « certitude des choses invisibles ». N’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez !
NB : Volte-espace soutient Leili Anvar depuis « France Culture … la fermeture à l’Esprit ! »