Je ne suis pas confiné
Je ne l’ai jamais été
Je ne le serai jamais.
Comme aucun d’entre nous.
De notre propre point de vue, nous sommes tous :
« … grand ouvert à l’arrière, illimité, libre, infiniment profond et immense ». (0)
&
Avant même le début officiel du confinement, dès l’irruption de la pandémie de Covid-19 en Italie, j’ai pensé au thème de ce billet. Je me suis longtemps retenu de l’écrire en raison des conditions très favorables dans lesquelles je vis ce confinement. J’habite une grande maison à la montagne, avec un vaste potager & verger – dans lequel il y a actuellement beaucoup à faire -, avec un large et haut versant, sillonné de sentiers, accessible juste derrière. Nos deux fils et leurs amies sont confinés avec nous, ce qui permet de conserver des rapports sociaux minimum. Nous sommes vraiment très très loin d’être les plus mal lotis.
Mais, suite à l’annonce d’un prolongement du confinement jusqu’au 11 mai, voire au-delà, je me décide à vous proposer ce billet. Et qui pour l’essentiel trouve sa source dans le premier témoignage du « Procès … »¹ :
« Le procès … » – Témoin à charge n°1, l’officier de police.
« Je voulais vérifier qu’il m’était impossible de faire un portrait de moi-même à l’intérieur de cette cellule. »
« La « cellule » n’était pas une cellule, il n’y avait pas de quatrième mur², et je n’étais pas dans la partie visible de la pièce.
« Tout ce que je vous demande à vous, les Jurés, c’est de regarder ce qui se présente à vous en cet instant, ce qui apparaît ici clairement. Non pas ce que vous imaginez, ce que vous croyez, ce que vous pensez, ce que vous inventez, mais ce que vous voyez réellement. C’est à dire trois murs au maximum. »
[…]
« N’êtes-vous pas toujours, de votre point de vue, grand ouvert à l’arrière, illimité, libre, infiniment profond et immense ? »
[…]
« Cette absence de choses derrière moi se révèle beaucoup plus réelle que n’importe laquelle des choses qui sont devant moi. Ce lieu si négligé est plus vrai qu’aucun autre lieu sur la carte … parfaitement visible d’un seul coup d’œil, toujours accessible, immuable … C’est mon pays d’origine. … Il est clairement conscient de sa propre nature et ne connaît aucune limite. Dans le sens négatif, il est mon échappatoire, la voie de sortie qui me permet de m’évader de la prison la plus solide. Dans le sens positif, il est ma voie d’accès à la liberté absolue que je suis. »³
[…]
« Il vous suffit de regarder en arrière sans vous retourner. Il n’y a rien là, Cela est parfaitement accessible et disponible. Et tout vient de là, Cela est infiniment généreux. … Notre Source ne se fait pas désirer, elle nous supplie de faire appel à elle. »
[…]
« Quel soulagement de se reposer sur Celui dont le nom est JE SUIS, le nom qui précède et introduit tous les autres ! Quel réconfort de se fonder dans l’infini et d’y puiser sa force ! Que ce soit dans cette cellule de prison, ou sur ce banc des accusés, ou dans la cellule des condamnés si vous m’y envoyez, derrière moi il n’y a toujours que la Liberté éternelle et l’incomparable Refuge. Je ne suis dans aucun de ces endroits exigus et sombres. Ils sont en moi qui suis la Clarté elle-même, propre à les accueillir. »
Cordialement
0 – Je ne cherche ici nullement à vous provoquer ni à vous convaincre de quoi que ce soit. Juste à vous inviter à faire votre propre observation, éventuellement crayon de papier en main pour dessiner noir sur blanc ce que vous voyez. Seulement ce que vous voyez.
« Je vous dis ce que je vois là où je suis. En est-il de même pour vous ? »
La dernière phrase de ce paragraphe grouillerait-elle de fautes d’orthographe ? Oui … et non ! Comme nous sommes Un dans notre vraie nature de « Première Personne », il ne saurait être question d’accorder en nombre « grand ouvert …, illimité, libre, infiniment profond et immense ». La carte ci-dessus représente conjointement la multiplicité humaine périphérique (dangereusement excessive) dans la zone « je suis humain » et l’unicité du « Je Suis ». Mais la meilleure façon d’intégrer cette représentation, « notre autoportrait », consiste à venir la construire ensemble dans un atelier de Vision du Soi.
¹ – Ce livre est aussi une histoire de confinement, mais il vous offre tous les moyens utiles & efficaces pour en sortir. Mais attention, comme indiqué dans l’Introduction, ce livre n’est pas anodin :
« Oui, vous courez vraiment un certain risque en lisant ce livre. Si cela vous inquiète, renoncez-y et passez-le à un ami qui ne craint pas de vivre dangereusement. J’ajouterai : vivre dangereusement pour atteindre la sécurité ultime. »
Et comme indiqué dans le dernier billet de la série, c’est un livre d’une exigence rare :
- A vous de le lire intégralement, en endossant tour à tour les rôles de John a-Nokes, l’accusé, ceux des témoins à charge et à décharge, ceux de l’avocat de la Couronne et du Juge. Ce livre propose en effet, selon le projet même de son auteur, un travail sur soi – aussi considérable que nécessaire – de psychodrame. Pas étonnant qu’il ait eu, pour l’instant, aussi peu de succès ! Mais les livres, comme les chats, ont plusieurs vies …
- A vous de faire réellement les dix-sept expériences proposées. Dans un souci pratique, Douglas Harding vous en offre même une liste de contrôle, pages 433 et 434, en différenciant bien l’expérience seulement lue de l’expérience faite. Et en rappelant qu’il y a autant de différence entre les deux qu’entre parcourir le menu et consommer le repas, qu’entre lire l’ordonnance et prendre le médicament …
- Et, bien sûr, à vous de transférer tout cela dans votre vie quotidienne, de transformer l’expérience en exercice, on pourrait dire en « ascèse », c’est-à-dire en « travail bien ordonné sur soi-même » selon la belle définition de St-Augustin.
“… c’est l’un des meilleurs, des plus séduisants exposés du sens profond de la vie chrétienne que j’ai jamais lus. […] Ce livre exerce l’esprit et touche profondément le cœur. »
² – Christiane Singer a elle aussi fait la même constatation dans « Derniers fragments d’un long voyage » :
« Il manque toujours un mur à toute chambre. Et tu étais seule à n’en rien savoir ! Maintenant la malédiction de l’ignorance est soulevée. »
Mais vous-même dans votre bureau devant votre écran, comme dans n’importe qu’elle autre pièce, ne voyez-vous pas clairement que vous n’êtes pas enfermé entre quatre murs mais espace d’accueil illimité & inconditionnel pour seulement trois ? N’en croyez pas un traître mot, comme d’habitude, vérifiez soigneusement !
Pourquoi est-il si souvent nécessaire d’être gravement menacé, de se retrouver comme Christiane Singer clouée sur un lit d’hôpital pour constater qu’ … :
« … il ne faut pas toujours mourir vraiment pour parvenir au lieu où on a la mort derrière soi. »
Pourquoi ne pas plutôt commencer par un atelier de Vision du Soi, où ce sont exclusivement des représentations erronées de soi-même qui meurent ?
³ – La seule chose qui importe c’est de faire l’expérience de cette « liberté absolue que je suis. » Pas les mots. Même si l’expression « Je Suis » s’avère particulièrement adaptée pour évoquer cette expérience, au point d’avoir été adoptée peu ou prou par presque toutes les grandes spiritualités, ne faites pas une fixation dessus si elle ne vous parle pas … encore.
Concentrez-vous sur vos sensations : est-ce que vous respirez plus au large, est-ce que vous sentez l’expansion, potentiellement illimitée, de votre corps de conscience & énergie, est-ce que vous vous sentez plus « frais & dispos », … ?
« Bref, tout cela était parfaitement simple, ordinaire et direct, au-delà du raisonnement, de la pensée, et des mots. En dehors de l’expérience elle-même ne surgissait aucune question, aucune référence, seulement la paix, la joie sereine, et la sensation d’avoir laissé tomber un insupportable fardeau. »
« La liberté est une sensation. Cela se respire. L’idée que nous sommes libres dilate l’avenir du moment. Elle fait s’éployer à l’extrême dans nos poitrines je ne sais quelles ailes intérieures dont la force d’enlèvement enivrant nous porte. Par une ample, fraîche, profonde prise de souffle à la source universelle où nous puisons de quoi vivre un instant de plus, tout l’être délivré est envahi d’une renaissance délicieuse de ses volontés authentiques. Il se possède. … »
Paul Valéry
« Regards sur le monde actuel »
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Comme ce billet s’avère particulièrement grave au cœur d’une situation qui ne l’est pas moins, je me permets d’en quelque sorte le conclure en renvoyant à quelque chose de plus léger : « Je suis donc tu es », un film de Maylis de Poncins. Vous trouverez bien 2 minutes et 20 secondes dans votre confinement pour le regarder …