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COVID-19 – Réflexions sur le sens d’une pandémie

Quelques extraits d’un article découvert sur le blog de Paul Jorion, consulté de temps à autre :

COVID-19 – Réflexions sur le sens d’une pandémie

« La crise de santé publique mondiale sans précédent que nous traversons aujourd’hui révèle sans doute quelques vérités fondamentales sur notre monde et notre destinée.

… Il est peut-être utile, en particulier, de s’interroger sur le sens historique et anthropologique du drame qui se déroule sous nos yeux.

Tragédie humaine

La première chose à souligner est évidemment que cette pandémie est et sera une tragédie pour des millions d’humains à travers le monde. …

Si les efforts de confinement sont insuffisants ou échouent, les systèmes de santé pourraient être totalement submergés, comme cela a failli arriver à Wuhan en Chine, et comme cela risque encore d’arriver dans le nord de l’Italie, avec des conséquences potentiellement désastreuses pour l’ensemble de la société. … De plus, le virus pourrait frapper le monde en plusieurs « vagues », comme l’avait fait la grippe espagnole en 1918-1919, et ce faisant briser véritablement des sociétés même complexes et avancées. Pour éviter le pire, l’humanité n’a pas aujourd’hui d’autre choix que de mener une guerre totale au coronavirus.

Un monde à l’arrêt

Deuxième observation, la force et la vitesse avec lesquelles le microscopique agent pathogène met le monde entier à l’arrêt sont tout simplement stupéfiantes. Ce qui se passe actuellement est sans précédent, et projette le monde dans des territoires totalement inconnus. De nombreux gouvernements à travers le monde sont sévèrement critiqués pour leur gestion de la crise, et souvent avec raison. …

Le coronavirus s’impose de fait comme le « grand perturbateur » de notre monde hyper-connecté, et pose un formidable défi à la civilisation humaine elle-même. Le voir bloquer si rapidement et si efficacement l’ensemble des éléments constitutifs de notre civilisation complexe et mondialisée est un spectacle à la fois terrifiant et fascinant. Nombreux sont probablement ceux qui éprouvent ces jours-ci le sentiment angoissant que le monde qui leur est familier, que leur monde, est en train d’imploser, de se briser, de s’effondrer, et il s’agit là d’un ressenti que la plupart d’entre nous ne sommes pas préparés, mentalement et émotionnellement, à gérer. Pour beaucoup, les croyances et les certitudes volent aujourd’hui en éclats comme jamais auparavant, ce qui génère inconfort et anxiété individuelle et collective. …

Les bulles éclatent

Le troisième point à noter est que cette crise sanitaire a et aura des conséquences économiques et financières considérables. SARS-CoV-2, de fait, est l’épingle qui vient finalement crever la « bulle universelle », c’est-à-dire l’ensemble des bulles spéculatives massives et synchronisées qui ont été gonflées depuis plus d’une décennie en réponse à la grande crise financière de 2008-2009, et qui ont soutenu la soi-disant « reprise » de la croissance mondiale depuis lors. Cette « bulle universelle » était condamnée à éclater tôt ou tard, mais le coronavirus a manifestement accéléré le processus. En réponse, et comme on pouvait s’y attendre, les principales banques centrales du monde tentent déjà d’inonder le système financier mondial de liquidités, comme elles l’ont fait après la crise financière. Cependant, leurs interventions n’ont pour l’instant que peu ou pas d’effet, les marchés financiers continuant de s’effondrer dans ce qui semble être une liquidation systémique inarrêtable.

« Elles » sont arrivées

De fait, il semble que le monde soit désormais rattrapé par ce que nous avons essayé d’ignorer et de nier depuis plusieurs décennies, à savoir les « limites à la croissance » économique, qui ont depuis longtemps été identifiées par des scientifiques et théoriciens des systèmes complexes dont les mises en garde ont cependant été largement ignorées, moquées ou déformées. Nous avons réussi pendant un certain temps à repousser ces limites grâce à la financiarisation, la mondialisation, la libéralisation et la « technologisation » de l’économie, et également au cours de la dernière décennie grâce à un aventurisme monétaire effréné. Mais tout ce que nous avons réussi à faire, au bout du compte, est de convertir l’économie mondiale en une « machine à bulles », dans laquelle le PIB croît essentiellement sous l’effet du gonflement de bulles d’actifs alimentées par l’endettement, et part périodiquement en fumée lorsque ces bulles éclatent. Cette machine est aujourd’hui enrayée, et elle a accumulé des problèmes qui dépassent désormais de très loin notre capacité à les résoudre. Les « limites à la croissance » sont finalement arrivées. Elles ne ressemblent pas totalement à ce qui était attendu, et elles portent un masque de protection, mais elles sont bel et bien arrivées …

Défaillance systémique

La crise sanitaire du coronavirus est ce qui révèle cette arrivée. Elle le fait en exposant, comme l’a souligné le journaliste canadien Andrew Nikiforuk, les vulnérabilités inhérentes à plusieurs conditions propres à notre ère technologique moderne et souvent présentées comme des marqueurs de progrès : des méthodes de production et de livraisons d’approvisionnement en mode « juste-à-temps », une urbanisation rapide, un allongement de la durée de vie, et une mobilité humaine inégalée, entre autres. En fait, et comme l’anthropologue américain Joseph Tainter l’a diagnostiqué il y a déjà longtemps, les sociétés humaines ont historiquement tendance à échouer sous l’effet des mêmes processus qui ont conduit à leur succès, ou à la perception de leur succès. C’est pourquoi, de tout temps, les sociétés ne comprennent généralement pas ce qui leur arrive lorsque ces processus cessent de produire du succès et commencent à induire l’échec. C’est pourquoi, également, elles sont inévitablement prises au dépourvu lorsque les choses commencent à mal tourner. …

La crise du COVID-19 pourrait maintenant être le déclencheur d’une accélération de ce processus d’échec sociétal que Joseph Tainter a appelé « effondrement », et qu’il définit comme une perte soudaine et majeure de complexité sociopolitique – ou bien elle pourrait simplement être un avant-goût de ce qui nous attend à l’avenir. La première hypothèse paraît de plus en plus probable, tant les dommages infligés par le microscopique agent infectieux à presque tous les aspects de notre complexité sociopolitique s’aggravent, s’accumulent et se conjuguent de jour en jour. Mais la seconde reste toujours possible, car il n’est pas totalement exclu que nous puissions parvenir par quelque artifice à retarder encore un peu l’inévitable. Si cela se produit, attendons-nous à ce que notre monde devienne pour une brève période de temps un endroit encore plus étrange et dysfonctionnel qu’il ne l’est déjà – avant que ne s’enclenche inexorablement ce que le penseur américain Nate Hagens a appelé la « Grande Simplification ».

Lutte entre agents pathogènes

Au-delà de toues ces considérations, cependant, il devient de plus en plus difficile de ne pas voir dans cet incroyable assaut contre les sociétés humaines du monde entier comme un moyen pour « Mère Nature » / « Gaïa » / le « système terrestre », ou comme on voudra bien l’appeler, de combattre son propre pire agent pathogène, à savoir Homo Sapiens. En effet, l’être humain, « conquérant de la nature », se trouve également être la pire source de dégradation du système terrestre, et la dégradation qu’il provoque sans relâche atteint désormais des niveaux critiques à de nombreux égards, et perturbe dangereusement l’équilibre d’ensemble du système.

Nous comprenons maintenant de plus en plus clairement que le système terrestre est un système vivant, et en tant que tel il est inévitable qu’il réagisse tôt ou tard afin de rétablir son équilibre, d’une façon ou d’une autre. …

Quoi qu’il arrive désormais concernant la pandémie de COVID-19, et même si nous parvenons à contrôler les dégâts cette fois-ci, cet épisode sans précédent devrait au fond probablement être perçu comme un avertissement à l’humanité, un avertissement que la réaction de Mère Nature contre son agresseur est enclenchée. Cette réaction ne s’arrêtera pas là, car le système terrestre doit se défendre contre ses agents pathogènes tout comme nous devons nous défendre contre les nôtres. On remarquera, au passage, que la carte de la pandémie montre que les zones les plus touchées semblent être précisément celles dont les habitants sont les plus responsables de la dégradation du système terrestre : la Chine, l’Europe de l’Ouest et très bientôt l’Amérique du Nord -–comme si Mère Nature avait décidé de concentrer sa réponse immunitaire contre les principaux coupables de ses tourments…

La « revanche de Gaïa », en fait, est et a toujours été inévitable. D’une manière ou d’une autre, le système terrestre rétablira son équilibre, et il le fera soit en « neutralisant » Homo Sapiens, soit en l’éliminant. C’est peut-être là la leçon la plus importante de l’épreuve que nous devons maintenant affronter. En fin de compte, c’est à cela que nous devons véritablement nous préparer, et à quoi nous devrons nous adapter si, en tant qu’espèce, nous voulons avoir une chance de survie. …

En attendant, également, des millions de personnes sont désormais confinées chez elles à travers le monde, espérant échapper à un ennemi invisible mais implacable dont elles savent et sentent qu’il se rapproche de jour en jour. Des millions d’autres seront dans la même situation dans quelques jours ou semaines. Bonne chance à eux tous, bonne chance à nous tous, et espérons que nous serons capables et désireux de comprendre le véritable sens de tout ceci une fois que le pire de la crise sanitaire sera passé. »

Paul Arbair

&

Illustration: Cas de coronavirus COVID-19 dans le monde, Center for Systems Science and Engineering (CSSE) de l’Université Johns Hopkins (JHU),

 

 

Cordialement

 

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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