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1 - Pratique de la Vision du Soi Fondamentaux Vision du Soi

Témoignage de Jean-Marc – Revue VST n°8/01-2001

« Il y a peu d’événements dans une vie. Les guerres, les fêtes et tout ce qui fait du bruit ne sont pas des événements. L’événement est la vie qui survient dans une vie. »

« Le Très-Bas »

Christian Bobin

Le temps est venu de raconter ce « commencement », cet événement hors du temps et vieux de cinq ans, cinq ans de paradoxes pour établir plus fermement ce qui était donné au départ, dès l’Origine.

Fin juin 1995, à Ardenne, j’essayai de me débarrasser de cette invraisemblable et bien réelle « collection de chauves souris dans le plus petit des beffrois » (Douglas Harding« La science de la première personne » – Chapitre 36), de cette fixation au passé qui m’interdisait de vivre heureux. Rendre l’inconscient conscient afin d’en être libre, voilà quel était le défi. Ceux qui ont tenté cette aventure  en connaissent toute la difficulté, mais j’étais très motivé suite à des années de souffrance, de mise en pratique de l’enseignement d’Arnaud Desjardins, et dans les bonnes mains de Claudie et d’Alain.

Durant cette première semaine, très éprouvante, j’appris l’existence d’un vieux gentleman anglais en regardant une cassette vidéo me proposant de « perdre la tête » ; j’étais alors bien trop préoccupé par le contenu de la mienne pour envisager cette « solution ». Sachant que ce M. Harding viendrait donner un atelier dans ma région quelques mois plus tard, je jetai un œil distrait, pardon deux, sur ce titre fleurant un peu trop la pensée positive à mon goût : « Vivre sans stress », bien sûr sans faire le moindre exercice …

C’est surtout le désir de retrouver Alain Bayod qui me conduisit à cet atelier de Grenoble, fin novembre 95,  juste pour voir … ! Voir surtout le miracle de ce vieux Douglas, malade depuis plusieurs jours, presque épuisé, et remis en selle au bout de dix minutes de conférence par … ce Mystère qu’il sert avec tant d’humilité, d’intelligence et de fidélité. Une très grande leçon de courage, qui dut motiver l’assistance à ne pas négliger les quelques expériences proposées : montrer du doigt Ici, en particulier. Faire sérieusement, honnêtement, cette banale série de gestes et juste voir … « peut » conduire à voir juste, au moins quelques instants. Je dois avouer que ce soir-là j’ai surtout été profondément troublé, tant est puissant le syndrome du « c’est bien trop simple » qu’il ne faut pas non plus négliger.

« L’évidence est une cause bien connue de cécité. »

« L’œil émerveillé »

Samivel

Lors de l’atelier du lendemain, Catherine Harding dirigea l’exercice de la carte et … comment trouver les mots pour dire ce que j’ai vécu  lorsque j’ai troqué ma tête pour le monde, cette sensation d’un fardeau instantanément volatilisé, du retour du centre de gravité à sa vraie place, un cœur vaste et apaisé.

Convaincu par cette expérience de première main, j’ai lu lors des trois mois suivants tous les ouvrages de Douglas alors disponibles, sérieusement, c’est à dire en faisant les exercices, en reprenant les schémas, et en constatant les innombrables liens qui peu à peu se tissaient entre cette « méthode » et ce que je connaissais de quelques champs de l’univers spirituel tels que le yoga, le zen, le vedanta, le christianisme. Univers auquel je consacrais depuis plus de vingt ans une attention soutenue, conformément à une loi de compensation somme toute assez classique.

J’avais cependant un travail à terminer, et je m’en revins à Ardenne pour deux semaines avec Claudie. « Comment échapper aux flammes de l’enfer ? Sauter là où elles sont les plus hautes », ou comme Dante sortir de l’enfer par son fond, voilà ce que me réservait ce deuxième séjour. Je vous passe les détails de ce sacré calvaire, qui constitua une excellente préparation  à ce qui s’ensuivit. Alain nous proposa un matin l’exercice consistant à perdre toute forme humaine jusqu’à ce qu’Ici il ne reste rien, plus exactement no-thing, le vide, la vacuité …

Je conserve une mémoire quasiment parfaite du « présent » qui a suivi : je porte un seau de déchets ménagers au tas de compost (juré !), et n’étant fondamentalement rien Ici, je suis aussitôt tout, chaque pavé, chaque tuile, chaque brin d’herbe givré de ce petit matin d’hiver, cette vigne, cette allée de grands marronniers, ce soleil orange à travers la futaie, cette brume légère et glacée qui enveloppe l’ensemble, ce ciel, cet univers … le contenu du seau , le tas ! Je vis cette grande parole des Upanishads, citée par Arnaud Desjardins :

« Le sage a pour corps l’univers entier ».

Ou, exprimé autrement : Jean-Marc verse le seau de Jean-Marc sur le tas de Jean-Marc !

C’était début mars 96. J’avais eu l’extraordinaire chance de vivre presque simultanément ce lâcher prise émotionnel et la vision de mon être réel, ce que je suis vraiment, vraiment, vraiment … Rien n’a changé mais tout a changé, et pour être honnête, si Voir « is a piece of cake » comme le dit Douglas, intégrer la Vision est une autre affaire : « Zen, c’est pas du gâteau » tonnait Maître Deshimaru.

Heureusement il y a eu cette grande semaine du « Procès … » à Ardenne durant l’été 96, d’autres ateliers avec Douglas, des lectures passionnées muni de la clé universelle de la Vision, des échanges avec des amis sur le chemin, la compréhension et l’amour d’Arnaud Desjardins, dont paradoxalement je me suis physiquement éloigné mais dont je ne me suis jamais senti aussi proche. Et surtout, surtout, l’entière disponibilité de cette Vision à laquelle tout ce qui est vu nous renvoie.

Reste à répondre à l’obligation de partage évoquée par Alain Bayod dans VST N° 1, et qui n’est peut-être pas si douce qu’il veut bien le dire … En attendant, le transfert de confiance du petit vers le Grand se poursuit, tranquillement, simplement, naturellement …

« Comme folle serait l’impatience » 

« Le huitième jour de la semaine »

Christian Bobin

Cordialement

 

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Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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