« Car les sentiers durent en moyenne beaucoup plus longtemps que les empires, répondant à des besoins plus sérieux. »
« Le fou d’Édenberg, IV »
Sentier du col de Cappellaccia
Ce roman de Samivel, publié en 1967, ne se passe pas en Corse mais à St-Béat, la patrie mythique des Raccard et des Icart, un endroit vraisemblablement alpin puisque limitrophe de l’Italie et, … confronté à la malédiction de l’or blanc.
Mais le sentier pastoral qui démarre un peu en amont du pont de Frasseta, dans la vallée de la Restonica, et monte vers le col de Cappellaccia et le plateau d’Alzo correspond plutôt bien au bel hommage de Samivel. Il est sans doute fréquenté depuis la préhistoire, lorsque des blocs de rhyolite du plateau étaient débités à coup de percuteurs en pointes de flèches, racloirs, et autres outils et armes …
Les bergers installés aujourd’hui aux bergeries d’Alzo perpétuent ce passage multimillénaire et fabriquent un succulent fromage … bien loin de toutes les diverses préoccupations « impériales ». Ils travaillent comme Siméon, le tranquille héros du roman, et font partie comme lui de la famille des, rares, « derniers hommes », aux antipodes des absurdes préoccupations d’une modernité déboussolée :
« … laissant aller les choses d’elles-mêmes, à leur gré, dans leur rythme, avec le temps. Peut-être le vrai secret du Toine [le père de Siméon] qu’il avait refilé à Siméon, le secret de toutes les bonnes choses, et pas seulement pour le fromage. »
« Le fou d’Édenberg, II »
Cordialement
NB : j’aime à penser que la Voie Sans Tête selon Douglas Harding – The headless way – est pareillement un « sentier » durable et des plus « sérieux ». Et que lorsque des voies apparemment plus prestigieuses, plus « impériales », qui occupent aujourd’hui l’espace médiatique à grand renfort de communication – de réclame ! – auront été déversées dans les poubelles de l’histoire, la Vision du Soi (Vision Sans Tête) sera toujours là, une « méditation pour la place du marché » et pour partout ailleurs, toujours aussi utile, simple, concrète, joyeuse …
Ayez l’audace de sortir des autoroutes sans issue, de prendre ce modeste sentier … qui mène sûrement au « Grand », à l’espace d’accueil illimité et inconditionnel que vous êtes, Contenant ultime, Visage Originel, …
L’honnêteté m’impose cependant d’écrire que tous les sentiers corses sont loin d’être aussi bons que celui-ci, ou que celui qui permet de redescendre dans les gorges du Tavignanu, depuis le refuge de la Sega jusqu’à Corte … loin s’en faut ! Que mes amis corses ne s’offusquent pas de ce bémol !