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1 - Pratique de la Vision du Soi Fondamentaux Vision du Soi

L’Amour dit …, la Sagesse dit … – Nisargadatta Maharaj

Un (« happy few ») lecteur de volte-espace m’a récemment demandé la référence précise de la citation « bien » connue de Nisargadatta Maharaj, généralement copiée/collée ainsi :

« Quand je vois que je ne suis rien, c’est la sagesse.
Quand je vois que je suis tout, c’est l’amour.
Et entre les deux ma vie s’écoule … »

Et à ma grande honte, j’ai constaté que je l’avais utilisée moi aussi dans divers billets de volte-espace sans en avoir vérifié l’exactitude et le contexte … (0)

J’ai donc passé la nuit à relire tout « Je Suis » et j’ai trouvé … En vérité non : j’ai surtout pu vérifier que « l’audace renferme en soi génie, pouvoir et magie » : j’ai pris ce livre en main (101 entretiens, 577 pages d’une typographie plutôt dense), j’ai commencé par le 51° en ne survolant que les passages précédemment repérés d’un coup de crayon dans la marge et, très rapidement, j’ai retrouvé ce passage :

« L’Amour dit : “Je suis tout”, la Sagesse dit : “Je ne suis rien”. Ma vie coule librement entre les deux ».

Entretien n° 57

En haut de la page 285

Troisième édition de juin 1995 aux « Deux Océans »

&

Mais bien évidemment la totalité de la question & réponse (… la totalité de l’entretien, la totalité de « Je Suis », la totalité de l’œuvre de Nisargadatta¹) mérite une lecture attentive :

« Q(uestion) : J’ai du mal à comprendre ce que vous voulez dire par “Je ne suis ni l’objet ni le sujet”. Là, à l’instant où nous parlons, ne suis-je pas l’objet de votre expérience et vous le sujet.

M(ajharaj) : Regardez, mon pouce touche mon majeur. Tous les deux touchent et sont touchés. Quand mon attention se porte sur mon pouce, il est celui qui sent et le majeur est le … soi. Changez le foyer de l’attention, la relation s’inverse.² En quelque sorte, je découvre qu’en changeant le foyer de l’attention, je deviens la chose même que je regarde et ressens le type même de conscience qu’elle possède ; je deviens le témoin intérieur de la chose. Cette capacité de pénétrer d’autres foyers de conscience, je l’appelle amour, mais vous pouvez l’appeler comme vous voulez. L’Amour dit : “Je suis tout”, la Sagesse dit : “Je ne suis rien”. Ma vie coule librement entre les deux. Puisqu’à tous les points de l’espace et du temps je peux être aussi bien le sujet que l’objet de l’expérience, j’exprime cette possibilité en disant que je suis, à la fois, les deux, ni l’un ni l’autre et au-delà des deux. »³

Q(uestion) : … »

 

Cordialement

 

0 – Sa demande et ma vaine réponse se trouvent dans les commentaires placés à la suite du billet « Vous n’avez pas besoin de changer – Nisargadatta Maharaj ». Mais je lui ai bien entendu aussitôt envoyé le lien vers ce billet.

L’étiquette Nisargadatta Maharaj permet d’accéder à diverses autres citations de cet auteur.

NB : Mais les temps changent. Ayant reçu pour le nouvel an une (trop) belle citation de Rainer Maria Rilke,  j’ai décidé de creuser un peu et, grâce à Gérard Pfister, j’ai découvert à quel point tout copié & collé non référencé pouvait s’avérer dangereux. Je vous livrerai bientôt le fruit de cette recherche.

Encore un mot pour vous dire de vous inscrire sans attendre à « La lettre du Lac Noir ».

¹ – La totalité de l’œuvre de Nisargadatta … cela commence à faire beaucoup, d’autant plus que de nombreux « nouveaux derniers entretiens » abondent : le filon Nisargadatta doit être juteux pour les éditeurs ! Juste un conseil d’ami : commencez plutôt par un atelier de Vision du Soi selon Douglas Harding, puis lisez ensuite tout Nisargadatta, histoire de vérifier par vous même s’il a bien « pigé le truc » !

Il me semble personnellement que c’est le cas (!), mais mon survol très rapide & très partiel d’hier soir a fait surgir l’intuition que Nisargadatta utilisait son fameux « Je suis » de manière assez imprécise. Il s’agit parfois (Cf. carte de la note n° 3 ci-dessous) du « je suis humain » périphérique, parfois du « Je Suis » central … et parfois encore de tout autre chose ! Pas toujours facile d’y voir clair dans ces conditions. Je me permets donc de réitérer le conseil d’ami ci-dessus.

² – Bel exemple de geste simple et éminemment pratique pour illustrer une attitude essentielle. Avec les index des deux mains vous pouvez aussi faire le geste ci-dessous :

Le faire réellement, pas vous contenter de regarder l’image. Le faire pour, notamment, bien distinguer l’objet – périphérique – du Sujet – central. Le faire pour vivre – simplement, concrètement, joyeusement – cette asymétrie fondamentale, « entrée principale » de ce Soi que nous sommes … Considérable proposition, à essayer, vérifier !

³ – Il y aurait bien des commentaires à écrire sur cet extrait. Je me contenterai de vous proposer d’utiliser la carte ci-dessous, la carte maîtresse de la Vision du Soi & notre « autoportrait » à tous, pour être rien & être tout, pour incarner véritablement sagesse & amour. Notre époque, beaucoup plus que d’autres, en a désespérément besoin, c’est « le seul espoir ».

Est-ce que tout ce qui précède dépendrait d’un contexte exclusivement oriental ? Pas d’après Maître Eckhart :

« Ce que nous recevons en sagesse nous le restituons en amour. »

(Citation non encore référencée … !)

Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

3 réponses sur « L’Amour dit …, la Sagesse dit … – Nisargadatta Maharaj »

Cher Jean-Marc, plutôt que de poursuivre indéfiniment une polémique qui ne connaîtra sans doute pas de fin, même si elle est reste passionnante et pertinente à bien des égards, j’ai préféré regroupé ici un ensemble de propositions que je voudrais vous soumettre. Vous pourrez simplement dire si celles-ci semblent correspondre à vos idées et lesquelles sont, selon vous, plus discutables.
1) la perfection comme l’éveil, l’illumination, la réalisation spirituelle…, sont de ce monde, ils sont réalisables dès cette vie et possibles en ce corps même ;
2) la vie divine est synonyme de non-dualité et inversement ;
3) la divinisation est par excellence la finalité de la vie humaine ;
4) tout est déjà présent ici et maintenant, il suffit seulement d’en prendre conscience ;
5) il n’y a rien à changer en cette vie pour connaître cet état sublime, ni à chercher à se convertir pour connaître Dieu ou obtenir l’illumination, il suffit simplement de « voir » ;
6) la vision, d’essence contemplative, est supérieure à l’action et à l’intellection ;
7) De même que la vision est supérieure à l’action, l’affectif est supérieur à l’intellect et à la volonté ;
8) les obstacles à la divinisation ne sont que des visions fausses, de même que la finitude humaine est une illusion ;
9) Notre propre nature est déjà divine et parfaite en soi, de toute éternité. La reconnaître est le but ultime de toute spiritualité ;
10) le mal comme la souffrance ne sont que des accidents, des épiphénomènes que l’on peut aisément dépasser ;
11) la Nature – ou le Cosmos – sont d’essence divine ;
12) la civilisation est un mal ou une erreur qu’il faut corriger ou abandonner ;
13) le mal réside dans l’ego, l’aveuglement sur sa véritable nature et le refus de voir sa propre divinité en soi ou sa propre perfection innée ;
14) le mental est ce qui nous sépare du divin et de notre véritable nature et de notre vrai Soi. Il fausse toutes choses, il faut donc l’éradiquer ou s’en détacher ;
15) une voie spirituelle qui permet d’accéder directement et aisément à cette Vision spirituelle existe, il suffit de l’emprunter pour parvenir à cette vision même et se délivrer de tout, comme de connaître la vie divine ici-bas ;
16) C’est dans la vision même (celle du Soi) que réside le mystère de cette vision divine, à la fois unificatrice, non-duelle et libératrice.
17) le silence et la contemplation sont meilleurs et supérieurs au travail intellectuel et au langage.
Je propose donc que nous échangions à partir de ces propositions ou ces principes qui sont loin d’être exhaustifs et peuvent être complétés ou corrigés.
Qu’en pensez-vous ? Et cela ne serait-il pas plus positif ?
Cordialement. Bruno

Bonjour Bruno,

Là vous essayez de m’asphyxier ! Mais vous avez de la chance, il fait encore trop chaud pour aller travailler au soleil. Je vais essayer de faire court … et nuancé.

1) la perfection comme l’éveil, l’illumination, la réalisation spirituelle…, sont de ce monde, ils sont réalisables dès cette vie et possibles en ce corps même ;

L’éveil à ce « Je Suis » central en chacun de nous est accessible en cette vie et en ce corps. Bien évidemment. Et sans doute plus simplement, concrètement, joyeusement avec la Vision du Soi qu’avec bien des méthodes … traditionnelles.
Mais l’éveil n’est que le début d’un chemin de … ? Je n’emploierais pas le mot « perfection ». D’unité et d’amour, pourquoi pas.

2) la vie divine est synonyme de non-dualité et inversement ;

Joker ! Plus de 20 siècles de controverses verbales n’ont pas tranché la question. Et pour cause : le langage dualiste par nature ne sert pas à grand chose pour avancer dans ce ou ces domaines.

3) la divinisation est par excellence la finalité de la vie humaine ;

Oui, avec toutes les réserves possibles sur le mot « divinisation ». Je vous renvoie à « l’hypothèse de travail minimale » d’Aldous Huxley.

4) tout est déjà présent ici et maintenant, il suffit seulement d’en prendre conscience ;

Oui. « … en prendre conscience » est peut-être déjà trop compliqué. Il suffit seulement de Voir.

Ceci dit, le complexe corps & mental étant doté d’une inertie considérable, une « discipline assidue » sera vraisemblablement nécessaire.

5) il n’y a rien à changer en cette vie pour connaître cet état sublime, ni à chercher à se convertir pour connaître Dieu ou obtenir l’illumination, il suffit simplement de « voir » ;

Oui & Non ! Il n’y a rien à changer d’essentiel. Cet « état sublime » n’est autre que notre véritable nature, dégagée de toutes les identifications périphériques. Mais demeurer là, après avoir retourné son regard vers sa Source (ce que le verbe « convertir » peut aussi signifier, fera vraisemblablement changer un peu, indirectement, le « petit » humain périphérique que nous sommes aussi. En mieux généralement.

6) la vision, d’essence contemplative, est supérieure à l’action et à l’intellection ;

Non, en quelque sorte. Le langage, et votre nature, vous conduit à séparer des « choses » qui ne le sont pas dans la vie.
« Voir » est en fait une action. Beaucoup d’actions non justement fondées sur une vision et/ou une « intellection » au sens fort du terme, ne sont que réactions et agitation stérile.

Un autre renvoi à ce billet, et notamment à la citation de Maître Eckhart : « Ce que nous recevons en sagesse nous le restituons en amour. »

7) De même que la vision est supérieure à l’action, l’affectif est supérieur à l’intellect et à la volonté ;

Non. Je crois que la volonté de ne pas « se contenter de trop peu » est essentielle.
« L’intellect » est à la fois une aide et une entrave.
« L’affectif » est une fonction trop fluctuante, trop dépendante de l’état du corps & mental, pour pouvoir se fonder dessus.

Consigne de base d’un atelier de Vision du Soi : Voir, juste Voir, ni penser, ni sentir. Ni vouloir comprendre !

8) les obstacles à la divinisation ne sont que des visions fausses, de même que la finitude humaine est une illusion ;

Oui. Toujours avec toutes les réserves possibles sur le mot « divinisation ».
« La finitude humaine » du complexe corps & mental est bien réelle. Mais la juste structure anthropologique est tripartite : l’Esprit vient compléter le tableau, heureusement !

9) Notre propre nature est déjà divine et parfaite en soi, de toute éternité. La reconnaître est le but ultime de toute spiritualité ;

Oui. Ce point équivaut au n° 5. Bémol sur « reconnaître ». Parce que, en réalité, c’est cette Vraie Nature qui Se reconnaît en moi, Ce n’est pas le moi-je qui accomplirait quelque chose d’exceptionnel … Ce « processus » exige en fait une extrême humilité de la part du moi-je …, quoi que vous en pensiez.

10) le mal comme la souffrance ne sont que des accidents, des épiphénomènes que l’on peut aisément dépasser ;

Non. La souffrance est bien réelle et c’est notre devoir d’essayer de la soulager dans la mesure de nos moyens. Mais est-ce que l’ignorance de notre Vraie Nature n’est pas une terrible souffrance ?
Le mal en soi … que peut-on bien en dire ?

11) la Nature – ou le Cosmos – sont d’essence divine ;

Joker. A quoi peut bien servir, concrètement, de se poser cette question ?

12) la civilisation est un mal ou une erreur qu’il faut corriger ou abandonner ;

Non. Mais de quelle « civilisation » parlons nous ?

Le Mahatma Gandhi avait répondu à un journaliste anglais qui lui demandait ce qu’il pensait de la civilisation occidentale : « Ce serait bien. »
Est-ce que le « modèle » américain qui s’est mondialisé constitue une civilisation ? C’est Einstein qui disait que l’Amérique était passée de la barbarie à la décadence sans passer par la civilisation … A méditer ! Le « rêve chinois » ne m’inspire pas non plus.

13) le mal réside dans l’ego, l’aveuglement sur sa véritable nature et le refus de voir sa propre divinité en soi ou sa propre perfection innée ;

Oui, toujours avec un gros bémol sur ce « mal » en soi … et sur « sa propre divinité en soi ».

Comme disait Ramana Maharshi, un autre « guru inculte » : « L’oubli du Soi est la source de toutes les misères. »

14) le mental est ce qui nous sépare du divin et de notre véritable nature et de notre vrai Soi. Il fausse toutes choses, il faut donc l’éradiquer ou s’en détacher ;

Oui & Non ! Le « mental » est une aide & entrave. Comme le chantait si bien Georges Moustaki ! Mais il conviendrait sans aucun doute de le relativiser, de le dé-diviniser.

NB Je garde les autres propositions pour plus tard. Je dois sortir travailler … la terre !

Cordialement.

Jean marc

Merci beaucoup à vous et de la peine que vous vous êtes donné pour répondre non pas à un interrogatoire (l’inquisition n’est pas de retour, je ne suis pas un inquisiteur et vous n’êtes ni un hérétique ni une une victime!) mais à cette série de propositions. Félicitations pour votre travail de le terre, qui elle, comme le disait un grand sage, au moins ne ment pas! Bruno

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