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Colibris : une (R)évolution intérieure

Le mouvement Colibris vient de diffuser l’annonce du lancement d’une nouvelle campagne citoyenne : une (R)évolution intérieure.

Comme cela doit bien faire au moins quatre ans que je m’efforçais vainement de convaincre ces braves gens de commencer par … ce commencement logique, je suis assez heureux qu’ils finissent par s’y résoudre¹.

Voici le préambule rédigé par Pierre Rabhi pour introduire cette action, accompagné de quelques commentaires en lien avec la Vision du Soi selon Douglas Harding. (Attention : chantier en cours, tant il y a à dire ! Cet article demeure incomplet bien qu’il soit en ligne.)

« Il ne peut y avoir de changement de société sans changement humain, et il ne peut y avoir de changement humain sans le changement de chacune et chacun de nous². »

Cette affirmation, plus actuelle que jamais, est une sorte de lieu commun. Elle va de soi, pour peu que l’on y réfléchisse. En la circonstance, le fameux « Connais-toi toi-même » reprend son acuité et sa vérité. Le philosophe indien Krishnamurti ne cessait de répéter :

« Nous sommes le monde et le monde est nous ».

Nul ne peut se soustraire à sa responsabilité d’être humain. Sauf à choisir, avec toute notre conscience, de mettre nous-même fin aux processus de la violence sous toutes ses formes (économique, idéologique, militaire, mais aussi domestique, éducative, sexiste, relationnelle, etc.), les exactions de l’homme contre l’humain et contre la nature finiront avec notre propre extinction.

La clé du changement est intérieure.

Pour autant, ni les philosophies, ni les religions, ni les croyances de toutes obédiences ne semblent en mesure de régler cette question³. Aucune d’entre elles ne joue la même partition. Pire, elles sont, par la diversité des points de vue, trop souvent divergentes et elles-mêmes causes de dissensions meurtrières depuis la genèse de l’histoire du genre humain. Les événements actuels sur toute la planète mettent en évidence que nous n’avons toujours pas éradiqué la violence. Nous y sommes même de plus en plus dévoués, avec les armes terribles dont la prolifération témoigne de la faillite de notre condition.

Je soupçonne la conscience de notre finitude(4), et l’angoisse qu’elle provoque, d’être à l’origine du marasme où la psyché collective s’enlise, suscitant la quête éperdue de sécurité. Nos actes sont comme guidés par la tentative d’abolir coûte que coûte cet insoutenable verdict, et de conjurer ce qui menace notre fragile et éphémère existence. Ainsi, les domaines physique comme métaphysique peuvent être les objets d’une spéculation chargée de dissiper l’insurmontable angoisse. Pour certains, les croyances dogmatiques sont un recours lorsque la voie de la raison et de la rationalité n’offre aucune certitude. J’invoque, quant à moi, en accord avec Socrate qui affirmait savoir qu’il ne sait pas, l’ignorance suprême (5). Notre planète, joyau parmi les joyaux au sein de l’immensité, est d’une beauté que le langage est souvent incapable d’exprimer sans recours à la poésie, comme quintessence de ce que l’être humain peut dire pour manifester sa jubilation.

Cependant, il m’est personnellement difficile d’imputer au fait du hasard le principe de Vie, comme échoué sur cette matrice merveilleuse il y a environ 4 milliards d’années. Comment nier la présence d’une sorte d’intention (6) dont nous aurions trahi la bienveillance par nos petites et grandes transgressions ? L’être humain, prisonnier de ses propres peurs et angoisses, tente d’observer le réel et la réalité dont il est lui-même l’un des témoignages. Sa vision fragmentée introduit ainsi le malentendu qu’il nous faut dissiper, car tout ce qui constitue le vivant nous constitue, et rien ne saurait être séparé (7). Ainsi sommes nous l’eau, la matière terrestre et minérale, le souffle, la chaleur, etc. Nous partageons ce qui est avec tout ce qui vit. De ce constat surgit une question majeure : pourquoi, dans l’ordre unitaire et coopératif originel, avons-nous exalté le principe de dualité (8) et d’antagonisme, et toutes les horreurs qui en découlent ? Sommes-nous condamnés à nous infliger sans cesse les souffrances que nous déplorons, et jalonner notre histoire des horreurs à nous seuls imputables ?

L’être humain,  la société humaine, doivent changer de cap, et confier leur destin aux forces du cœur plutôt qu’au pouvoir trompeur de la peur et de la division (9). L’être humain est en grande partie responsable de sa condition sur terre. Ces considérations une fois admises confirment bien que sans changement humain il ne peut y avoir de changement de société. Cette proclamation peut devenir une incantation stérile sans un examen attentif de ce qu’elle implique pour chacune et chacun d’entre nous, à travers nos réalités individuelles et collectives. Sommes-nous capables de transcender nos réactions primaires pour nous élever au rang d’êtres humains libérés des oripeaux d’une histoire révolue et pourtant, sans cesse, redondante ?

Nos choix politiques et militants ne suffisent pas : nous pouvons manger bio, manifester contre le nucléaire, recycler nos déchets, retourner à la terre et, pourtant, nuire à nos semblables et perpétuer la souffrance. C’est pourquoi l’action de la campagne « (R)évolution Intérieure » du mouvement Colibris se justifie pleinement. Affirmer que le changement de la société est subordonné au changement de l’être humain est encore une fois une vérité absolue. Bienveillance, générosité, partage, équité, empathie, solidarité sont finalement des manifestations d’une conscience créatrice d’un monde libéré.

Cette énergie extraordinaire appelée « amour » est, sans le moindre doute, la plus grande énergie de transformation du monde. Elle est la vraie révolution intérieure. »

Pierre Rabhi, cofondateur du Mouvement Colibris

Cordialement

 

¹ – Je n’étais sans doute qu’un parmi d’autres, que je me plais à espérer nombreux.

Dans un CD d’entretiens avec Pierre Rabhi intitulé « Transformation » diffusé en 2010 par l’excellente (mais défunte) revue Alliances, Alain Chevillat le presse d’engager le mouvement Colibris de manière plus résolue dans cette voie de l’intériorité, qui fonde et légitime sa voix, mais lui préfère se réfugier dans un silence … que je persiste à considérer coupable. Si les choses changeaient, enfin, j’en serais très heureux.

² – Spirituellement parlant, mais aussi stratégiquement, ça commence plutôt mal !

« Changement humain » … ? Ce mot « changement » mis à toutes les sauces – notamment ces brouets si peu ragoûtants du management et de la politique – pourrait se voir simplement accolé ainsi l’adjectif « humain » pour que l’avenir s’éclaire … ? Bien sûr que non, nous le savons tous pertinemment.

Ce qui est nécessaire n’est rien moins qu’une métamorphose – nouvelle naissance, éveil, libération, metanoïa, … – pour que justement nous devenions enfin humains. Ou, selon une image traditionnelle aussi puissante que généralement mal comprise, pour que nous passions de la mort à la vie. Des « morts-vivants » qui en constituent la très grande majorité peut-il émaner autre chose qu’une société mortifère ?

Et de quel « changement » s’agit-il véritablement ? Il ne s’agit en aucun cas de construire une autre personne, de « polir la brique pour en faire un miroir », de « méditer pour devenir un bouddha », de faire « toujours plus de la même chose » (du développement personnel assez fréquemment) pour en fin de compte ne « réussir qu’à échouer »

Non, il convient juste d’adopter un point de vue juste sur nous-mêmes, de prendre conscience de notre vraie nature, de notre « visage originel ». Ce à quoi nous aspirons (enfin, certains …), ce qui est le fondement d’une société vivable parce que vivante, nous le sommes déjà, intégralement … Le « changement » consiste simplement (!) à dissiper l’illusion, tenace, du contraire.

« Changement de chacun et chacune … » ? Non, désolé, il s’agit là encore d’une erreur propre à notre monde moderne englué dans l’économisme et la statistique, et qui au mieux renvoie la transformation sociale aux calendes, et au pire décourage vu l’ambition déraisonnable de ce « changement » majoritaire. Le point de vue traditionnel est beaucoup plus optimiste et réaliste à la fois : chaque « transformé, éveillé, libéré, … » l’est au nom de tous et pour tous, sans limites d’espèces et de règnes. Ce qui rejoint parfaitement l’assertion de Krishnamurti, vraisemblable déclinaison d’une grande parole des Upanishads : « Le sage a pour corps l’univers entier. »

³ – Pierre Rabhi a bien sûr raison, mais s’il convient de jeter résolument « l’eau du bain » des Plus Grands Communs Diviseurs, n’est-il pas plus que temps d’apporter tous nos soins attentifs au « bébé » du Plus Petit Commun Multiple, c’est-à-dire la spiritualité ou « Philosophie éternelle » telle qu’étudiée (notamment) par Aldous Huxley ? Il n’existe aucune autre option pour mettre fin à la violence. C’est du moins ma conviction la plus profonde.

C’est pourquoi il me semble assez peu raisonnable d’écrire un tel préambule et de déclarer en gros à ses lecteurs : démerdez-vous ! Je n’ai rien à vous conseiller : « ni philosophies, ni  religions, ni croyances de toutes obédiences » … nada !

4 – (Désolé, mais la version actuelle de WordPress ne m’autorisant que trois notes de bas de page avec des caractères adaptés, je continue de manière moins esthétique.)

« Finitude » … Toute la spiritualité tend justement à faire prendre conscience du contraire, de notre « infinitude » ! Lorsque la dimension de l’Esprit vient « accomplir » les dimensions basiques « Corps & Âme » que Big Brother s’évertue par tous les moyens à nous faire croire comme étant les seules, ce qui équivaut à une castration de l’essentiel, nous retrouvons notre véritable dimension … infinie ! A partir de là, tout s’éclaire et il devient enfin possible de retrousser efficacement ses manches. N’en croyez pas un traître mot, essayez, vérifiez !

5 – « L’ignorance suprême » : nous sommes bien d’accord, il n’y a aucun « savoir » possible sur ce Centre, sur notre vraie nature.

6 – Sans aller jusqu’à un « dessein intelligent », il est effectivement possible de convenir d’une évolution de la vie vers plus de conscience, et peut-être même … d’amour. Je sais, ce n’est pas toujours évident en découvrant les actualités … Mais là encore, à chacun de faire sa part de colibri.

7 – C’est l’évidence, désormais établie scientifiquement un peu plus finement chaque jour, que rabâche la Philosophie Éternelle depuis des lustres. Pourquoi dès lors,

 » … ne pas faire appel à ces ressources ancestrales de sagesse que sont les “ technologies spirituelles” en les alliant à nos techniques modernes afin de promouvoir un nouvel art de vivre ? Pourquoi réserver à la sphère individuelle des méthodes de “développement personnel” dont nous avons tout autant besoin sur le plan collectif ? »

Patrick Viveret

Oui, pourquoi, surtout en disposant de la Vision du Soi qui constitue une véritable percée en matière de transmission des fondamentaux de la Philosophie Éternelle ?

8 – Ne serait-ce pas lié au fait que le langage est un outil essentiellement dualiste ? D’où l’intérêt de sortir du concept et de s’immerger dans le percept comme le proposent les expériences de Vision du Soi.

9 – Oui, Pierre, il est plus que temps de passer de la « division » à une « Vision » non-dualiste. C’est là le seul et indispensable fondement d’une véritable (R)évolution. Mais Colibris, qui propose des outils dans la plupart des autres dimensions périphériques de l’existence – alimentation, santé, habitat, éducation, … – ne peut pas faire l’impasse de ne pas en proposer dans la dimension centrale … La Vision du Soi selon Douglas Harding ne vous conviendra peut-être pas, mais au moins, ayez l’audace de la tester.

 

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Par Jean-Marc Thiabaud

Jean-Marc Thiabaud, 65 ans, marié, deux fils, un petit-fils.
La lecture de "La philosophie éternelle" d'Aldous Huxley m'oriente précocement sur le chemin de la recherche du Soi.
Mon parcours intérieur emprunte d'abord la voie du yoga, puis celle de l'enseignement d'Arnaud Desjardins.
La rencontre de Douglas Harding en 1993 me permet d'accéder à une évidence que je souhaite désormais partager.

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